Les instruments financiers occupent une place importante dans un environnement IFRS. Ils permettent aux groupes de se couvrir en cas d’évolution défavorable du prix d’un élément financier ou non financier. Toutefois, ils n’offrent pas toujours la possibilité de bénéficier d’une évolution favorable du cours de ce même sous-jacent…
Par Pierre Astolfi, maître de conférences à l’Université Paris-Est Créteil, associé Atriom
1. Instruments financiers et IFRS
Les normes comptables internationales distinguent les deux principales catégories d’instruments de couverture suivantes :
– les couvertures de juste valeur (ou fair value hedge) : la couverture souscrite doit permettre à l’entreprise de se protéger contre les variations de la juste valeur d’un actif ou d’un passif ;
– les couvertures de flux de trésorerie (ou cash-flow hedge) : la couverture doit permettre à l’entreprise de se protéger contre les variations futures des flux de trésorerie décaissés ou encaissés.
La couverture doit permettre, qu’il s’agisse d’une couverture de type fair value hedge ou cash-flow hedge, de se prémunir contre une hausse de la volatilité du résultat sous l’effet d’une plus grande volatilité du sous-jacent couvert. La souscription d’instruments de couverture relève donc, a priori, d’une gestion saine et prudente des activités opérationnelles ou financières de l’entreprise.
Pour autant, la politique de couverture peut conduire, notamment dans le cas des couvertures à terme, à des effets induits qu’il convient de bien anticiper.
Une illustration est fournie par la question des couvertures contre les augmentations des cours du pétrole souscrites par de nombreuses compagnies aériennes.
2. Illustration : application au cas des couvertures contre les hausses des cours du pétrole souscrites par les compagnies aériennes
2.1. De l’importance de la couverture…
La couverture consiste pour une compagnie aérienne à se couvrir contre une hausse du cours du pétrole. L’achat à terme est l’instrument de couverture le plus fréquemment utilisé dans le secteur.
Se couvrir contre une hausse des cours du pétrole répond à une préoccupation essentielle pour les acteurs de l’industrie du transport aérien compte tenu du poids des dépenses de carburant. A titre d’illustration, le carburant représente, respectivement, 35 % et 32 % des dépenses opérationnelles des compagnies américaines Delta Air Lines et United Continental.
Un instrument de type achat à terme (lequel ne permet pas de bénéficier d’une évolution favorable du prix du pétrole) est pertinent dans un contexte de volatilité et de visibilité raisonnables sur les cours du pétrole, le tout dans un contexte généralement haussier. Or actuellement, aucune de ces conditions n’est réunie : la volatilité des prix du pétrole a augmenté au cours des derniers mois, en même temps que la visibilité sur les perspectives futures d’évolution se dégradait. Le tout sur fond de baisse prononcée des cours de pétrole…
Dans ce contexte, si la baisse des cours de pétrole doit permettre aux compagnies, à terme, de réaliser des économies, elle va se traduire à court terme par un impact négatif en termes comptables.
En effet, la valeur d’un instrument de couverture de type achat à terme est d’autant plus faible que diminue la valeur du sous-jacent contre les hausses duquel une société a souhaité se couvrir.
C’est ainsi que toutes les couvertures souscrites antérieurement au récent mouvement baissier du pétrole sont autant de produits financiers inefficaces. L’inefficacité est ici appréciée d’un point de...