Lorsque les associés d’une société ne s’entendent plus, ou lorsque certains d’entre eux n’exécutent pas leurs obligations, comme celle de réaliser un apport, la dissolution de la société peut être la voie vers laquelle il conviendra de se tourner, à défaut de solution plus satisfaisante. Cette dissolution met fin à la société et permet aux uns et aux autres de reprendre leur liberté.
Par Bruno Dondero, associé, CMS Francis Lefebvre Avocats
Il n’est cependant pas toujours évident de réunir la majorité requise pour voter la dissolution, car il y a là une modification des statuts, qui requiert dans la plupart des sociétés une majorité qualifiée. Pour éviter les situations de blocage, le Code civil autorise la dissolution par décision de justice.
L’article 1844-7 du Code civil dispose ainsi que : «La société prend fin : (…) 5° Par la dissolution anticipée prononcée par le tribunal à la demande d’un associé pour justes motifs, notamment en cas d’inexécution de ses obligations par un associé, ou de mésentente entre associés paralysant le fonctionnement de la société.»
Tant le jeu des virgules que la construction de l’article laissent entendre que la paralysie du fonctionnement de la société est liée au cas de la mésentente entre associés, et seulement à celui-là.
Un arrêt récent de la Cour de cassation juge toutefois que la condition de paralysie doit être satisfaite y compris au cas où la dissolution est demandée pour inexécution1.
Trois personnes physiques avaient constitué une SARL, dont un associé avait demandé la dissolution pour justes motifs. Précisément, la demande était fondée à la fois sur la mésentente entre les associés, qui aurait paralysé le fonctionnement de la société, et sur l’inexécution des obligations de l’un des associés.
La chambre commerciale de la Cour de cassation juge le 3 mai 2018 que «l’inexécution de ses obligations par un associé ne permet, en application de l’article 1844-7, 5° du Code civil, le prononcé judiciaire de la dissolution anticipée de la société pour juste motif qu’à la condition qu’elle paralyse le fonctionnement de la société». La solution avait été suggérée par une précédente décision2 ; elle est affirmée plus clairement.
Cette exigence est tout de même surprenante. On conçoit que l’on puisse exiger la condition de paralysie de la société...