Une société établie dans un Etat membre de l’Union européenne qui n’impose pas les bénéfices des succursales situées dans d’autres Etats membres peut-elle néanmoins déduire les pertes définitives subies par ces succursales ?
On se souvient que la CJUE avait apporté une réponse positive à cette question par un important arrêt « Bevola » du 12 juin 2018 (aff. C-650/16). Elle avait alors jugé que la situation d’une société danoise ayant subi des pertes définitives (c’est-à-dire inutilisables à l’étranger) à travers un établissement stable situé en Finlande était comparable à celle d’une société danoise ayant réalisé des pertes à travers un établissement danois.
La CJUE vient cependant de préciser, dans un arrêt du 22 septembre 2022 (aff. C-538/20), que cette solution ne vaut que lorsque l’Etat du siège renonce à son pouvoir d’imposer le résultat des établissements stables étrangers sur le fondement de son seul droit national, c’est-à-dire de façon unilatérale.
A l’inverse, lorsque l’impossibilité d’imposer le résultat d’un établissement stable étranger résulte d’une convention fiscale, les situations nationales et internationales ne sont plus comparables. La liberté d’établissement n’est alors pas invocable.
En l’espèce, la société allemande requérante n’était donc pas en droit de déduire en Allemagne les pertes subies lors de la fermeture d’un établissement stable situé au Royaume-Uni, dès lors que l’Allemagne a renoncé à son pouvoir d’imposer le résultat de cet établissement stable à travers la convention fiscale qu’elle a conclue avec le Royaume-Uni, et non de façon unilatérale.
La portée de ce nouvel arrêt sur la législation française apparaît encore incertaine. On peut toutefois soutenir que la...