La réforme du régime fiscal des fusions offre des perspectives intéressantes pour les opérations de carve-out et notamment de filialisation d’activité avant cession à un tiers. Pour autant, le législateur n’a clairement pas entendu instaurer un régime général d’exonération pour ces opérations, ce qui oblige à faire preuve d’une certaine prudence en la matière et à bien préciser les contours de la réforme pour en éviter les écueils potentiels.
Par François Pierson, avocat associé et Grégoire Madec, avocat associé, Taj
Le régime de faveur des fusions (et autres opérations assimilées) applicable en matière d’impôt sur les sociétés1 a été profondément réformé par la seconde loi de finances rectificative pour 2017, et ce pour des questions de mise en conformité du régime français avec le droit européen2.
L’apport principal de cette réforme, récemment commentée par l’administration fiscale, est la suppression de l’engagement de détention de trois ans qui, selon le cas, pesait :
– sur la société apporteuse à raison des titres émis par la société bénéficiaire en rémunération d’un apport partiel d’actif ou d’un apport de titres assimilés à une branche complète d’activité ;
– sur l’actionnaire de la société scindée à raison des titres émis par les sociétés bénéficiaires d’une scission ;
– ou encore, sur l’actionnaire de la société apporteuse à raison des titres de cette dernière et des titres émis par la société bénéficiaire d’un apport-attribution.
La suppression de cet engagement de détention devrait favoriser les opérations de restructuration préalables à une cession («carve-out») et notamment la filialisation d’une activité avant sa cession à un tiers. En effet, avant la réforme, ces opérations ne pouvaient bénéficier du régime de faveur à défaut de pouvoir respecter un délai de trois ans entre la restructuration et la cession.
Cela étant, le législateur n’a manifestement pas eu la volonté d’aller plus loin que la simple mise en conformité du régime français avec le droit européen, et n’a ainsi pas instauré un régime général d’exonération, indépendant de tout facteur temps. Il importe donc de bien préciser les contours de la réforme pour en déterminer les perspectives réelles en matière de carve-out.
1. Caractère non absolu de la suppression des engagements de détention
1.1. Maintien d’un engagement de détention pour les opérations soumises au régime de faveur sur agrément
Malgré la réforme, un engagement de détention reste applicable aux opérations de restructuration soumises au régime de faveur sur agrément, c’est-à-dire :
– aux opérations d’apport partiel d’actifs ou de scission, en l’absence d’apport d’une ou plusieurs branches complètes d’activité ou d’éléments assimilés1 ;
– aux opérations d’apport-attribution, lorsque la société apporteuse ne dispose pas au moins d’une branche complète d’activité après l’apport ou lorsque l’apport ne porte pas sur une branche complète d’activité4.
On notera que dans ses commentaires, l’administration fiscale a pris une position très restrictive quant aux opérations d’apport-attribution de titres assimilés à une branche complète d’activité. Selon l’administration, le nouveau...