Et si, au détour d’un texte, la Commission et le Parlement européens avaient grandement modifié les règles en matière de conflits d’intérêts ? C’est la question que l’on peut se poser à la lecture du règlement délégué 2019/820 du 4 février 2019 (le «Règlement») complétant le règlement 345/2013 du 17 avril 2013 relatif aux fonds de capital-risque européens (1).
Par Jérôme Sutour, avocat associé, CMS Francis Lefebvre Avocats
Pour rappel, le principal intérêt du règlement 345/2013 précité est de définir le label EuVECA (European Venture Capital Fund) applicable aux fonds d’investissement alternatifs («FIA») conduisant des stratégies de capital investissement et gérés par des gestionnaires qui ne sont pas directement soumis à la directive 2011/61/UE («AIFM»). Bien qu’ils ne soient donc pas soumis aux conditions normalement applicables aux gestionnaires de FIA, les gestionnaires d’EuVECA (les «Gérants») doivent se conformer à des conditions, notamment de bonne conduite, similaires à celles fixées par la directive AIFM. Les Gérants y demeurent d’ailleurs soumis, quand bien même ils relèvent de l’AIFM.
On pourrait donc penser que le Règlement se serait contenté de reproduire les normes applicables en matière de conflits d’intérêts prévues par le règlement délégué 231/2013 du 19 décembre 2012 complétant l’AIFM («Règlement AIFM»). Il n’en est rien.
Tout d’abord, le Règlement étend le champ des situations susceptibles de constituer des cas de conflits d’intérêts et vise par exemple, au-delà de ce qui est prévu dans le Règlement AIFM :
– l’intérêt du Gérant AIFM dans la conduite d’activités, et non seulement la fourniture de services ou la réalisation de transactions, exercées au bénéfice du FIA ou de ses investisseurs, qui ne coïncident pas avec l’intérêt de ces derniers ;
– l’influence et l’intérêt personnel à influencer l’évolution d’une entreprise de portefeuille éligible aux dépens du FIA ou de ses investisseurs, ou aux dépens de la réalisation des objectifs du FIA ;
– le versement d’incitations autres que celles visées à l’article 24 du règlement AIFM.
Si cette dernière différence peut être considérée comme cosmétique, le règlement AIFM prohibant la réception d’incitations...