Les potentialités du droit de la concurrence sont sous-exploitées dans le secteur de l’économie numérique. Les évolutions technologiques pourront offrir des possibilités d’actions nouvelles.
Par Patrick Hubert, avocat associé, Orrick
Des potentialités sous-exploitées
Quatre instruments existent déjà, en premier lieu, un instrument procédural semble, a priori, particulièrement approprié pour encadrer les mouvements très rapides de l’économie digitale: les mesures d’urgence. Au lieu d’étudier un dossier à fond pendant des années et d’aboutir à une sanction tardive, les autorités peuvent, à l’issue d’une procédure très courte, prononcer des injonctions provisoires qui doivent être respectées jusqu’à ce que, beaucoup plus tard, une conclusion définitive ait été atteinte. Des décisions rendues en quelques semaines semblent a priori plus adaptées au rythme toujours plus rapide de la transformation digitale que des procédures durant des années. Le prix à payer est évidemment le risque d’erreur dans l’appréciation et la qualification des faits. Un exemple français illustre les avantages et les inconvénients des procédures d’urgence. Dans l’affaire précédemment citée des iPhone distribués exclusivement par Orange, l’Autorité a levé, à titre conservatoire, l’exclusivité accordée par Apple à Orange.
D’autres entreprises ont pu alors en bénéficier et vendre immédiatement des iPhones. La mesure présente un caractère assez irréversible : si Orange avait obtenu gain de cause au fond en obtenant le rétablissement de son exclusivité, elle n’aurait jamais pu récupérer les pertes engendrées par la mesure conservatoire. Or tout porte à croire que la décision sur le fond aurait été favorable à Orange, à lire en tout cas l’arrêt par lequel la Cour de cassation a annulé les mesures conservatoires prononcées par l’Autorité française.