Alors que la crise sanitaire et la guerre en Ukraine ont accéléré la volonté des Etats de se protéger de la concurrence venue des pays hors Europe, un règlement européen encadrant les subventions étrangères reçues par les groupes qui réalisent des opérations de M&A ou participent à un appel d’offres public au sein de l’UE, vient d’être adopté. Une mesure favorable aux entreprises, mais qui va les conduire à un travail administratif plus lourd.
En 2015, le fabricant de pneus italien Pirelli passait sous le giron du groupe chinois ChemChina avec l’accord des autorités européennes de la concurrence. A l’époque, ce feu vert avait rapidement été dénoncé par plusieurs spécialistes. En effet, le groupe asiatique avait en amont procédé à une augmentation de capital, correspondant au montant de l’opération avec Pirelli, auprès d’un fonds souverain chinois. Or cette intervention étatique faussait la concurrence sur le marché européen. « Si, au sein de l’UE, la Commission européenne s’assure que les aides versées par les Etats membres ne créent pas de distorsion de concurrence et ne défavorisent pas les entreprises au sein du marché intérieur, dans le cas de Pirelli, le soutien financier venant d’un Etat extérieur à l’UE, les règles sur le contrôle des aides d’Etat ne s’appliquaient pas », explique Christophe Lemaire, avocat associé au sein du cabinet Ashurst.
Profitant d’un vide réglementaire sur ce sujet, plusieurs autres opérations subventionnées par des pays étrangers ont ainsi eu lieu ces dernières années en Europe. La crise sanitaire, puis la guerre en Ukraine, ont poussé les pays de l’UE à mieux se protéger contre ces pratiques jugées déloyales (voir encadré). Ainsi, en 2020, plusieurs Etats membres, dont la France, ont lancé des débats visant à mettre un frein à ce type d’opérations. Après un premier accord politique en juillet dernier, un règlement relatif aux subventions étrangères faussant le marché intérieur a été adopté le 14 décembre dernier, puis publié dans la foulée le 23 décembre.