Depuis l’arrêt factuel de toute approbation des investissements chinois à l’étranger imposée par l’Etat chinois en décembre 2016, le contrôle gouvernemental s’est progressivement assoupli. Le contexte est propice : les réserves en devises de l’Etat chinois ont augmenté en 2017 et le RMB (yuan ou renminbi) s’est revalorisé.
Par Xinyu Hu, avocat counsel en corporate/fusions & acquisitions et responsable du China desk. Il accompagne les entreprises et les investisseurs chinois dans leurs opérations transactionnelles vers la France et l’Europe, mais également les investisseurs français vers la Chine. xinyu.hu@cms-fl.com
et Hugo Winckler, avocat en corporate/fusions & acquisitions et membre du China desk. Il conseille et assiste les investisseurs chinois dans leurs opérations transactionnelles vers la France, mais également les investisseurs français vers la Chine. hugo.winckler@cms-fl.com
Si l’activité des fonds d’investissement chinois à l’étranger demeure limitée et strictement réglementée, certains signes annoncent la reprise des opérations d’acquisition à l’étranger par des fonds chinois, pour des acquisitions en adéquation avec la stratégie de développement industriel de la Chine.
Le principe : un cadre réglementé
Avant décembre 2016, la Chine a connu une hémorragie de fonds chinois transférés à l’étranger, pour diverses raisons et hors du contrôle de l’administration chinoise. L’objectif principal de la nouvelle série de réglementations, promulguées depuis le second semestre 2017, a donc été d’assurer que les investissements chinois à l’étranger, y compris ceux réalisés par des fonds d’investissement, n’échappent plus au contrôle des autorités chinoises. D’autres réglementations récentes ont même exigé que les acquisitions réalisées par des structures étrangères, effectivement contrôlées par des ressortissants chinois, soient aussi soumises à l’approbation du gouvernement chinois.
En réinstaurant un cadre juridique au contrôle des investissements à l’étranger, le Gouvernement a signalé sa volonté de les promouvoir. Le contrôle administratif demeure, en principe, une simple procédure déclaratoire et tout refus doit être motivé par une raison grave1. Par contre, l’obligation d’information de l’investisseur a été élargie et renforcée, et porte sur toute la chaîne financière, et cela jusqu’au bénéficiaire définitif.
Certains types d’investissement seront particulièrement promus et d’autres seront fortement découragés. Si les listes définitives ne sont pas encore connues, certains éléments communiqués par les administrations chinoises donnent une première idée des industries qui seront favorisées. Ainsi, l’Etat chinois a établi en mai 2017, une liste des investissements dits «sensibles» et donc déconseillés, celle-ci est même devenue classique et a été renforcée par une réglementation de janvier 2018. Outre, les secteurs sensibles2, la création de fonds d’investissement directement à l’étranger reste clairement à «décourager» pour l’Etat chinois.
Les assouplissements prévisibles pour les fonds
Les projets d’investissement par les fonds chinois ont été spécifiquement visés par les réglementations chinoises récentes. Ainsi, dans une réglementation en date du 1er mars 2018, la National Development and Reform Commission a prévu les détails de l’obligation d’information d’un fonds chinois ayant la forme d’une société équivalente à la «société en commandite par actions», dans le cadre d’une acquisition outbound. Cette mention est un élément positif, étant donné que dans la pratique chinoise, l’absence de règles signifie non pas l’autorisation, mais bien plus souvent l’interdiction3.
Par ailleurs, nous remarquons que l’octroi de licences aux Qualified Domestic Limited Partners4 a repris en Chine. Cela signale également l’assouplissement des contrôles chinois quant à la sortie de fonds vers l’étranger.
Au vu de cette évolution réglementaire en Chine, nous estimons que les fonds d’investissement chinois joueront un rôle plus important sur le marché international. Ils devraient se comporter surtout comme des investisseurs financiers stratégiques et se focaliser sur les projets susceptibles d’apporter des synergies économiques aux cibles d’acquisition5.
1. Telle que la violation de la loi ou l’atteinte à la sécurité de l’Etat.
2. Le domaine des loisirs, les clubs sportifs, l’immobilier, l’hôtellerie et les médias.
3. Par exemple, l’investissement à l’étranger directement par des individus.
4. Filiales chinoises, de fonds d’investissement et de banques d’affaires étrangers, autorisées à lever des fonds en Chine pour les investir sur les marchés financiers à l’étranger.
5. Recherche et développement complémentaire, croissance envisagée sur le marché chinois.