Par François Couret, avocat associé, CMS Bureau Francis Lefebvre
En dépit du fait qu’elle était discutée sous le sceau de l’urgence, la loi
n° 2015-990 dite Macron a connu une gestation plutôt longue. Bien évidemment, ce ne sont pas les dispositions techniques qui nous concernent ici qui en ont retardé l’adoption. Ces dispositions, pour l’essentiel, témoignent d’une volonté d’assouplissement de contraintes hostiles à l’initiative économique. La loi est dédiée à «la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques». Ainsi le régime des actions gratuites peut redevenir attractif alors qu’il avait largement cessé de l’être. Celui des BSPCE se trouve ravivé alors qu’il semblait sombrer dans l’oubli. La loi Hamon imposant des contraintes d’information des salariés en cas de cession d’entreprise voit se rétrécir son domaine d’application et n’est plus désormais sanctionnée par une nullité qui n’avait pas sa place ici. Un véhicule d’investissement nouveau, la société de libre partenariat, vient compléter l’offre des véhicules déjà disponibles (FCP, SICAV) avec pour objectif d’attirer des investisseurs étrangers tentés par des formules voisines au Luxembourg ou dans des Etats pratiquant le partnership.
Cet assouplissement des contraintes qui participe de l’esprit de la loi n’est pas exclusif de dispositions inspirées par un souci de limiter certains avantages et plus particulièrement ceux qui découlent de retraites-chapeaux. Ici les textes se veulent moins incitatifs que porteurs d’un souci de moralisation. De même le plafonnement du nombre de mandats sociaux à trois dans les sociétés anonymes employant un certain nombre de salariés témoigne d’une défiance dans l’air du temps à l’encontre des cumuls.
Comme on peut le constater fréquemment aujourd’hui, la démarche du législateur a été passablement erratique. Par exemple, la Société de Libre Partenariat qui est une innovation très significative est le fruit d’un simple amendement : la question n’a pas véritablement été pensée par les auteurs de la loi. Elle a toutefois été réfléchie par des groupes de travail qui connaissaient bien le capital-investissement. La loi correspond ici moins à la volonté populaire qu’à celle de think tanks. Peut-être au fond faut-il s’en réjouir. Eloigné de considérations idéologiques, le texte se veut pragmatique et tend à répondre avec un certain réalisme aux besoins de la vie des affaires.
Le dossier de cette Lettre s’efforce de présenter les principales innovations de la loi. La richesse du texte interdisait de prétendre à l’exhaustivité. Certains chapitres de la loi ne sont pas étrangers à nos préoccupations : ainsi la facilitation du crédit inter-entreprise ou encore la possible cession forcée des actions dans le cadre de plans de redressement. La place manquait pour ces développements. Il est probable que l’on y reviendra dans un des prochains numéros de la Lettre.