Si tous les pays de la zone euro ont vu leur dette publique augmenter en raison de la crise sanitaire, ils l’ont fortement réduite depuis, à l’exception de la France. Le gouvernement prévoit une baisse modeste d’ici 2027, alors que la dette risque de devenir problématique à moyen-long terme, dans un contexte de taux d’intérêt supérieurs à la croissance, susceptible de provoquer un effet boule de neige.
Le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, qui présentera ce mercredi 27 septembre le projet de loi de finances pour 2024, insistera sans nul doute sur le sérieux budgétaire de la France, gage d’une maîtrise de l’endettement public. Le gouvernement sera « intraitable » sur la réduction des déficits, dans l’optique d’une baisse du poids de la dette, a déjà déclaré l’hôte de Bercy, qui promet de ramener le déficit public français de 4,8 % du PIB en 2023 à 4,4 % en 2024, avant de revenir sous les 3 % en 2027. Mais saura-t-il convaincre les acteurs économiques et les marchés ? Fin avril, l’agence de notation Fitch avait émis de sérieux doutes sur les objectifs de maîtrise de la dette, décidant de « dégrader » la note de la dette publique française, la faisant passer de AA à AA-. Si la France inquiète, c’est d’abord parce qu’elle se singularise : certes, tous les pays occidentaux ont vu leur dette publique s’accroître fortement en raison de la crise sanitaire – la dette publique française est passée de 98 % à 118 % du PIB, au plus haut –, mais l’évolution depuis 2022 diverge entre la France et notamment le reste de la zone euro.
Une dette publique équivalente à l’addition des déficits budgétaires passés
- En France, le déficit et la dette publique tiennent d’abord à l’Etat (les administrations sociales et les collectivités locales étaient en excédent budgétaire en 2022), la dette étant tout simplement constituée de l’addition des déficits budgétaires passés, année après année. En effet, l’Etat ne rembourse pas sa dette à proprement parler, puisqu’il procède à de nouveaux emprunts pour rembourser ceux qui arrivent à échéance. Si le budget de l’Etat comprend une ligne « intérêts », il n’inclut en revanche aucune section « remboursement », l’Agence France Trésor étant chargée d’émettre de nouvelles obligations pour financer à la fois le déficit budgétaire de l’année en cours et le remboursement des titres parvenus à échéance.
- Les intérêts payés par l’Etat (charge de la dette) ont atteint 38 milliards d’euros en 2022, contre 24 milliards l’année précédente. Mais cette forte hausse tient avant tout aux obligations indexées sur l’inflation, pour lesquelles le budget de l’Etat passe des provisions en cas de hausse des prix. Le coût de ces obligations dépendra de l’inflation sur toute leur maturité. La charge de la dette devrait augmenter progressivement, à mesure que les emprunts à taux élevés remplacent les titres émis à des coûts très faibles, depuis 2015.
Un différentiel de dette toujours plus important avec la zone euro
« En 2019, la dette publique de la France était 12 points de PIB au-dessus de la moyenne de la zone euro, souligne Olivier Garnier, directeur général des statistiques, études et international à la Banque de France. Pendant la crise sanitaire, l’augmentation a été assez parallèle, mais depuis, le ratio a peu diminué en France, alors qu’il a beaucoup baissé...