L’impôt minimum mondial conçu dans le cadre de l’OCDE (pilier 2) ne concernera pas seulement les paradis fiscaux : près de 40 % des profits localisés dans les pays riches risquent d’être soumis à cette nouvelle législation. En raison d’un mode de calcul fondé sur les comptes consolidés et d’effets par ricochet à l’international de toute décision fiscale prise dans un pays, cet impôt va provoquer un véritable bouleversement de la pratique fiscale des grandes entreprises.
En France, on n’en compte pas moins de 574, selon l’étude d’impact du projet de loi de finances pour 2024, discrètement publiée par Bercy. Ce sont les grandes entreprises, réalisant plus de 750 millions d’euros de chiffre d’affaires, qui sont, depuis le 1er janvier, concernées par le pilier 2 de la réforme fiscale impulsée par l’OCDE, autrement dit l’impôt minimum mondial. Seule une minorité de ces grandes entreprises françaises auront un impôt élevé à payer, si l’on en croit les estimations de l’Association française des entreprises privées (Afep). « Le montant médian d’impôt supplémentaire au titre de pilier 2 est limité à 3,5 millions d’euros pour les membres de l’Afep, et 30 % des entreprises y échapperont », souligne Laetitia de La Rocque, directrice des affaires fiscales de l’Afep. Mais tous les groupes concernés devront s’astreindre à déclarer leur bénéfice consolidé et leur impôt, pays par pays, dans chaque juridiction où ils disposent de filiales. Cela sera le cas dès cette année.
«Les contrôles fiscaux pourront reposer sur les comptes consolidés ; dès lors devant les tribunaux, les questions ne porteront plus sur l’article 10 du Code général des impôts mais sur la norme IFRS 10. »
Un délai de 18 mois après la clôture de l’exercice 2024
Même si l’impôt minimum vient d’entrer en vigueur, « dès cette année, les entreprises concernées devront communiquer auprès de leurs commissaires aux comptes sur la mise en œuvre du pilier 2, au titre des comptes pour 2023 », relève Laetitia de La Rocque. Cependant, les entreprises disposeront d’un délai de dix-huit mois après la clôture du premier exercice concerné (celui de 2024), soit jusqu’au 30 juin 2026, pour déposer formellement leur déclaration auprès de l’administration fiscale