Et si la BCE abaissait ses taux directeurs avant la Fed ?
Afin de contrer la progression de l’inflation, la Fed avait, en 2022, amorcé un cycle de hausse de ses taux directeurs avec quatre mois d’avance sur la BCE. Constatant le reflux progressif de la hausse des prix au second semestre 2023, les investisseurs prévoyaient une réduction des taux Fed Funds pour ce mois de mars. Cependant, ils repoussent déjà cette échéance, surpris par la résilience de l’économie américaine dont la croissance annuelle s’élève à 3,10 %. De son côté, la BCE communique sur une première réduction de taux en juin. Or, contrairement aux Etats-Unis, la croissance européenne, aujourd’hui proche de zéro, reste orientée à la baisse. C’est également le cas de l’inflation, qui diminue à 2,80 % sur les douze derniers mois, à 2,10 % sur les six derniers mois et même à -0,6 % sur les trois derniers mois. De toute évidence, le taux de dépôt à 4 % de la BCE est supérieur au taux neutre d’équilibre (taux ni restrictif, ni accommodant), car il freine la conjoncture européenne, alors que le taux Fed Funds à 5,50 % devra être maintenu constant plus longtemps afin de ralentir l’économie américaine. Cela signifie, pour les marchés, qu’ils devront réviser leurs anticipations, car finalement la Fed pourrait abaisser ses taux directeurs bien après la BCE.
Thierry Million est directeur de la gestion obligataire d'Allianz Global Investors France. Ingénieur diplômé en Informatique de l’Institut de Recherche polytechnique de Mulhouse, titulaire d’un DESS en finance de l’Institut Supérieur de Gestion et diplômé de la SFAF, Thierry Million débute sa carrière en 1987 en tant que courtier et responsable de la Trésorerie chez Dynabourse. Il est ensuite gérant obligataire à la Banque Vernes. En 1994 il rejoint Dresdner RCM Gestion en tant que directeur de la gestion obligataire. En 2001 il devient Responsable des activités Product Management et Conseil d’AGF Asset Management. A partir de 2003, il prend la responsabilité des portefeuilles diversifiés des institutionnels et entreprises, ainsi que de la recherche quantitative et économique. En 2006, il est nommé directeur de la recherche économique et quantitative et du Conseil, puis directeur de la gestion obligataire d’Allianz Global Investors en 2008. Depuis 2013, il est directeur de la gestion obligataire institutionnelle.
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