Le «stress financier» au cœur de l’approche de la Fed
La Fed s’annonce beaucoup moins déterminée à remonter ses taux qu’en décembre dernier. Pourquoi ? C’est en réalité l’approche de «risk management» qui est revenue sur le devant de la scène. Cette «approche assurantielle» – popularisée par Alan Greenspan – consiste à agir, dans certains cas, en fonction des risques (afin de s’en prémunir) plutôt qu’en fonction du scénario le plus probable. Dit autrement, un risque perçu comme systémique peut infléchir la politique monétaire indépendamment des fondamentaux usuels (croissance, emploi, inflation).
Les indices de stress financier sont des variables de choix pour mesurer ce type de risque ; lorsqu’ils dépassent un certain seuil, c’est la probabilité d’un accident systémique qui augmente brutalement.
Aux Etats-Unis, l’indice de la Fed de Cleveland a sonné l’alarme en atteignant des niveaux qui n’ont été observés qu’à trois reprises au cours des 25 dernières années : en 1998 avec la faillite du fonds LTCM, en 2007-2008 puis en 2011 avec la contagion de la crise grecque. Parmi ces trois épisodes, on dénombre certes deux fausses alertes (1998 et 2011). Mais on note que, dans ces deux cas, la politique de la Fed s’est infléchie, ce qui a contribué à apaiser le stress ; la Fed a baissé ses taux en 1998 et mis en place l’opération Twist en 2011 (visant à faire baisser les taux à long terme). D’une certaine façon, on peut soutenir que la Fed vient de nouveau d’infléchir sa politique monétaire en revoyant à la baisse ses propres perspectives de hausses de taux directeurs : le dollar et la Bourse ne s’y sont d’ailleurs pas trompés. Gardons néanmoins à l’esprit que les politiques d’assurance ne changent pas la donne !
Didier Borowski est responsable de la recherche sur les politiques macroéconomiques au sein de l’Amundi Investment Institute. Auparavant, il a exercé plusieurs fonctions : responsable de la stratégie Taux et Changes, co responsable de l’équipe de Stratégie et Recherche économique, responsable de la macroéconomie puis plus récemment responsable global views. Avant de rejoindre Amundi, il était économiste et stratégiste senior de Société Générale Asset Management (2000-2009). Didier Borowski a commencé sa carrière au sein de la Direction de la Prévision du Ministère de l’économie et des finances. Il a également exercé les fonctions d’expert auprès de la Commission européenne. Didier Borowski est Docteur ès sciences économiques. Il a été Professeur associé à l’Université Paris Nord (2007-2011) puis a enseigné plusieurs années à l’université Paris-Dauphine.
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