Les taux négatifs seront-ils suffisants pour débloquer l’épargne ?
Les taux monétaires ne sont pas les seuls à tomber en dessous de zéro. La part des titres obligataires dont les rendements sont négatifs s’accroît. Mais en dépit de conditions financières ultra-accommodantes et d’une trésorerie abondante, et désormais taxée, les entreprises investissent encore trop peu. En cause, l’excès d’épargne qui pousse le «taux d’intérêt naturel» – celui qui réalise le plein-emploi – à la baisse et peut-être même en territoire négatif. Compte tenu de la faiblesse de l’inflation, les taux d’intérêt réels ne baissent pas assez et la zone euro se trouve piégée dans un équilibre de sous-emploi, ce qui pèse sur le potentiel de croissance et les anticipations d’inflation. A défaut d’être pleinement validée par les faits, la thèse de «stagnation séculaire» gagne les esprits, ce qui peut d’ailleurs s’avérer auto-réalisateur : la faiblesse des débouchés anticipés décourage l’investissement productif et gonfle encore plus l’excès d’épargne. La politique monétaire, seule, ne parvient pas à casser le cercle vicieux. D’où les recommandations de plus en plus pressantes de Mario Draghi visant à lui associer la politique budgétaire (quand il est possible de le faire) pour stimuler la demande globale. L’Allemagne est clairement visée. Il existe à coup sûr des projets d’investissement dont le taux de rendement est supérieur au taux d’intérêt ! Il manque un «coup de pouce». Les idées ne manquent pas : du financement de la transition énergétique à celui d’infrastructures vieillissantes, en passant par la sécurité. La dette léguée aux générations futures sera indolore si elle permet de financer l’avenir.
Didier Borowski est responsable de la recherche sur les politiques macroéconomiques au sein de l’Amundi Investment Institute. Auparavant, il a exercé plusieurs fonctions : responsable de la stratégie Taux et Changes, co responsable de l’équipe de Stratégie et Recherche économique, responsable de la macroéconomie puis plus récemment responsable global views. Avant de rejoindre Amundi, il était économiste et stratégiste senior de Société Générale Asset Management (2000-2009). Didier Borowski a commencé sa carrière au sein de la Direction de la Prévision du Ministère de l’économie et des finances. Il a également exercé les fonctions d’expert auprès de la Commission européenne. Didier Borowski est Docteur ès sciences économiques. Il a été Professeur associé à l’Université Paris Nord (2007-2011) puis a enseigné plusieurs années à l’université Paris-Dauphine.
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