Mon taux est plus négatif que le tien
A la fin du mois de janvier, la Banque centrale du Japon s’est décidée à adopter un taux négatif de - 0,10 % sur les réserves en excès, nouvellement constituées par les banques. De surcroît, elle se dit disposée à abaisser davantage ses taux si cela est nécessaire. La BoJ rejoint ainsi le cercle des banques centrales à taux de dépôt négatif : Suisse (- 0,75 %), Danemark (- 0,65 %), Suède (- 0,50 %) et l’Eurozone (- 0,30 %).
La course aux taux négatifs est totalement engagée. Le 11 février, la Banque de Suède a encore réduit son taux de - 0,15 %, dans le but de faire remonter les anticipations d’inflation par la dépréciation de la couronne suédoise. Toutes ces actions s’attachent à limiter l’influence des décisions de la BCE, attendues le 10 mars prochain. M. Draghi a clairement indiqué que l’institution pousserait beaucoup plus loin sa politique non conventionnelle. Une baisse de son taux de dépôt à - 0,50 % est déjà envisagée par les marchés, comme l’indique le rendement à - 0,55 % des emprunts d’Etat allemands à deux ans.
La Fed, aujourd’hui en situation de (très prudente) normalisation monétaire, a néanmoins demandé aux banques de prévoir, pour les «stress tests», des taux d’intérêts négatifs entre 2016 et 2019. La Banque centrale américaine n’exclut donc pas d’entrer dans la danse.
Cependant, les événements boursiers récents démontrent que cette course effrénée à la baisse des taux inquiète les investisseurs, face à son impact sur la rentabilité des banques.
En outre, l’efficacité des actions des banques centrales suit une courbe décroissante. L’arme des taux négatifs, destinée à affaiblir la devise, commence à s’enrayer. Pour preuve, le yen et l’euro se sont sensiblement réappréciés. Mais, pour l’heure, et en dépit de l’effritement de leur crédibilité, les banques centrales continuent d’y croire et d’alimenter cette spirale infernale, dont elles ignorent comment en sortir.
Thierry Million est directeur de la gestion obligataire d'Allianz Global Investors France. Ingénieur diplômé en Informatique de l’Institut de Recherche polytechnique de Mulhouse, titulaire d’un DESS en finance de l’Institut Supérieur de Gestion et diplômé de la SFAF, Thierry Million débute sa carrière en 1987 en tant que courtier et responsable de la Trésorerie chez Dynabourse. Il est ensuite gérant obligataire à la Banque Vernes. En 1994 il rejoint Dresdner RCM Gestion en tant que directeur de la gestion obligataire. En 2001 il devient Responsable des activités Product Management et Conseil d’AGF Asset Management. A partir de 2003, il prend la responsabilité des portefeuilles diversifiés des institutionnels et entreprises, ainsi que de la recherche quantitative et économique. En 2006, il est nommé directeur de la recherche économique et quantitative et du Conseil, puis directeur de la gestion obligataire d’Allianz Global Investors en 2008. Depuis 2013, il est directeur de la gestion obligataire institutionnelle.
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