Qu’attendre pour les marchés financiers de la politique monétaire de la Réserve fédérale en 2014 ?

Publié le 22 novembre 2013 à 11h34    Mis à jour le 30 avril 2014 à 18h11

Patrick Artus

La Réserve fédérale est confrontée à une double difficulté. D’une part, il apparaît assez clairement que la reprise économique aux Etats-Unis est fragile. L’investissement des entreprises ne redémarre pas, la production industrielle ne repart pas ; la hausse modeste des taux d’intérêt à long terme (le taux des crédits immobiliers est à 4,20 %) a conduit au retournement à la baisse de la demande de crédits immobiliers et des permis de construire.

Il est donc très probable que la Réserve fédérale souhaite éviter une hausse des taux d’intérêt à long terme en 2014. Mais, par ailleurs, elle doit réduire la croissance de la liquidité (de la base monétaire), c’est-à-dire réduire ses achats de titres publics et d’ABS (aujourd’hui 85 milliards de dollars par mois), c’est-à-dire mettre en place le «tapering». Comment faire cela et éviter la hausse des taux d’intérêt à long terme ?

La réponse est probablement une «forward guidance» stricte (engagement à ne pas remonter les taux d’intérêt à court terme), assortie d’un objectif de chômage bas (la Réserve fédérale parle maintenant de 6 %). Nous pensons donc que la politique monétaire de la Réserve fédérale en 2014 va conduire à une moindre croissance de la liquidité sans qu’il y ait de remontée importante des taux d’intérêt à long terme.

Ce sont donc plutôt les effets sur les marchés financiers de la moindre croissance de la liquidité qu’il faut rechercher. L’abondance de liquidité aux Etats-Unis avait d’abord conduit à la remontée des cours boursiers et des prix de l’immobilier aux Etats-Unis, l’excès de liquidité étant réinvesti dans ces actifs. Une moindre liquidité aux Etats-Unis devrait donc freiner la hausse des actions et des prix de l’immobilier domestique.  

L’abondance de liquidité avait aussi conduit à l’affaiblissement du dollar, les investisseurs s’inquiétant de la croissance monétaire des Etats-Unis ; on peut donc anticiper un redressement du dollar par rapport à l’euro et aux monnaies des pays émergents, autres que la Chine.

Enfin, l’abondance de liquidité aux Etats-Unis avait conduit à des flux de capitaux très importants vers les marchés d’actions des pays émergents ; ces flux devraient se réduire (on l’a déjà vu durant l’été 2013) et retourner à la baisse les marchés d’actions et les devises des pays émergents autres que la Chine, particulièrement des émergents ayant des déficits extérieurs importants (Brésil, Inde, Turquie, Thaïlande, Afrique du Sud, Indonésie) les plus sensibles au recul des entrées de capitaux.

Patrick Artus Membre du Cercle des Economistes

Patrick Artus est Chef économiste de Natixis depuis mai 2013. Polytechnicien, diplômé de l’Ensae, et de l’IEP Paris, Patrick Artus intègre l’Insee en 1975, où il participe notamment à des travaux de prévision et de modélisation, avant de rejoindre, cinq ans plus tard, le département d’économie de l’OCDE. En 1982, il devient directeur des études à l’Ensae puis il est nommé, trois ans plus tard, conseiller scientifique au sein de la direction générale des études de la Banque de France. En 1988, il intègre la Caisse des dépôts et consignations, où il exerce successivement en tant que chef du service des études économiques et financières puis responsable de la gestion actif-passif. En 1993, il est nommé directeur des études économiques, responsable de la recherche de marché chez CDC-Ixis. Devenu en 1998 directeur de la recherche et des études de Natixis, il est promu chef économiste en mai 2013. Depuis septembre 2024, il est conseiller économique d'Ossiam. Il est également membre du Cercle des Economistes.

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