Une photographie du «corporate america» très décevante
Cela est passé quasiment inaperçu, mais, cet été, le comptable national américain a fortement révisé en baisse la chronique des profits des entreprises aux Etats-Unis. En fait, les salaires ont été révisés en hausse, la valeur ajoutée a été revue en baisse, le tout pesant sur les profits.
Au-delà de ces ajustements comptables, les données révèlent d’autres faits saillants. D’abord, la profitabilité macroéconomique est nettement moins flatteuse que celle des entreprises cotées sur les marchés actions (elle-même biaisée par quelques entreprises). Ensuite, la baisse de la fiscalité a fortement soutenu les profits : sans les baisses d’impôts, la dynamique serait baissière sur les profits ! Enfin, et surtout, les profits ont été essentiellement redistribués aux actionnaires (sous forme de dividendes ou de rachats d’actions), mais n’ont pas été réinvestis, ce qui est inquiétant pour la productivité et ce faisant pour les perspectives de croissance.
Dans un contexte de conflit commercial, de fortes incertitudes politiques et géopolitiques, d’endettement élevé des entreprises américaines et de hausse du dollar, il y a un risque de dégradation supplémentaire de la profitabilité. Une nouvelle détérioration du taux de marge serait alors susceptible de provoquer un ajustement plus sérieux de l’investissement. Au final, le cycle économique n’a pas disparu : il vient un moment où la hausse des salaires pèse sur les profits, menace l’investissement et relance la perspective d’une récession aux Etats-Unis.
Christophe Morel est chef économiste de Groupama Asset Management
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