Les directions financières dans la crise

PAREF mise sur ses outils digitaux

Publié le 17 avril 2020 à 11h27

Propos recueillis par Thomas Feat

Actif dans la gestion et l’investissement immobiliers en propre et pour compte de tiers, le groupe PAREF (40,3 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2019) maintient aujourd’hui l’essentiel de son activité grâce à une politique de digitalisation soutenue de ses outils de gestion.

Tout récemment, le groupe a même finalisé les cessions et acquisitions de plusieurs actifs en France et en Allemagne. Si elle n’a pas sollicité les dispositifs d’urgence mis en place mi-mars par les pouvoirs publics, la direction financière du groupe a toutefois été contrainte de lancer un certain nombre de chantiers, tels que l’évaluation de l’impact financier des dispositions permettant aux petites et moyennes entreprises de suspendre provisoirement le versement de leurs loyers. Antoine Onfray, directeur général délégué du groupe, responsable des fonctions financières, revient en détail sur ces mesures.

Comment la crise sanitaire actuelle affecte-t-elle votre activité ?

Le groupe PAREF, société d’investissements immobiliers cotée (SIIC), réalise aujourd’hui deux types de missions : l’exploitation en propre d’environ 200 millions d’euros d’actifs immobiliers et la gestion pour compte de tiers particuliers et institutionnels, principalement sous formes de SCPI et d’OPCI. Cette dernière est effectuée au travers de deux filiales détenues intégralement par l’entreprise, PAREF Gestion et PAREF Investment Management. Le groupe est implanté en France, marché dont il tire l’essentiel de ses revenus, mais également en Italie et en Suisse via deux bureaux de représentation, et gère des actifs en Allemagne. A ce jour, la propagation de l’épidémie de Covid-19 n’a pas affecté notre capacité opérationnelle, puisque l’intégralité de nos 70 collaborateurs, qu’il s’agisse des gérants de portefeuilles, des commerciaux ou des financiers et autres membres des fonctions supports, ont travaillé depuis leurs domiciles ces dernières semaines et continuent de le faire. Une telle flexibilité nous est permise aujourd’hui grâce à une politique de digitalisation soutenue mise en œuvre ces deux dernières années.

En effet, tous nos logiciels, hébergés sur des serveurs locaux, distants, indépendants et répliqués pour fluidifier les flux, sont accessibles depuis n’importe quel ordinateur dans le monde grâce à des droits d’accès. Nous nous sommes dotés par ailleurs de nouveaux outils de gestion informatiques propres, par exemple, au property management et à la comptabilité générale et immobilière, à partir desquels nous pouvons produire, extraire et échanger rapidement des données essentielles sans qu’aucun contact physique soit nécessaire. 

Corollaire de la poursuite de notre activité, nous avons cédé, début avril, plusieurs actifs détenus en propre par le groupe pour un montant total net vendeur de plus de 3 millions d’euros, et acquis divers immeubles résidentiels et commerciaux en France et en Allemagne pour le compte de deux de nos SCPI.

Il va sans dire que le groupe chinois Fosun, actionnaire majoritaire de PAREF depuis 2017, qui détient aujourd’hui près de 60 % de son capital social, nous a été d’une aide précieuse pour anticiper la crise et évaluer la potentielle gravité de la pandémie avant que celle-ci n’atteigne l’Europe. Les échanges avec ce partenaire, de visu ou par mails, ont été nombreux depuis le début de l’année. 

Comment la direction financière de PAREF s’est-elle organisée ces dernières semaines et comment travaille-t-elle aujourd’hui ? 

Les fonctions finances du groupe, qui regroupent une vingtaine de collaborateurs, sont structurées en trois départements : la comptabilité générale à laquelle est rattachée la comptabilité consolidation, la comptabilité immobilière et, enfin, le corporate finance où sont regroupés le contrôle de gestion, la trésorerie, la gestion des financements et la communication financière. Chacun de ces trois départements est placé sous la responsabilité d’un directeur, avec lequel je réalise un point téléphonique ou par visioconférence quotidien. La conduite à distance des missions de la direction financière est facilitée par le fait que celle-ci dispose de nombreux outils de gestion informatique accessibles depuis des ordinateurs personnels — logiciel de comptabilité générale, outils de consolidation, divers modules financiers rattachés à notre ERP – ainsi que d’outils de communication collaboratifs externes – Microsoft Teams – ou interne à l’entreprise.

Alors même que PAREF poursuit son activité, l’entreprise va-t-elle se tourner vers les dispositifs exceptionnels mis en place par les pouvoirs publics ?

En 2019, nous avons réalisé un résultat net consolidé de 13,5 millions d’euros, en hausse de 14 % sur un an. Nous avons également mené à bien un refinancement de 100 millions d’euros effectué sous la forme d’un prêt et d’une ligne de crédit disponible et confirmée. Notre position de liquidité, qui s’établit aujourd’hui à 44 millions d’euros, est d’autant plus confortable que nous n’avons à rembourser aucune échéance de dette avant 2024. Compte tenu de ces éléments, il ne nous apparaît pas nécessaire de solliciter des aides d’Etat auxquelles d’autres entreprises, beaucoup plus touchées que nous, peuvent légitimement prétendre.  

De même, nous n’avons pas fait appel à nos partenaires bancaires pour obtenir un rééchelonnement du remboursement de la dette contractée par le groupe PAREF. En revanche, dans le cadre de l’un des organismes de placement collectif immobilier (OPPCI) détenu partiellement par notre entreprise, nous avons demandé le décalage durant plusieurs mois du remboursement d’un certain nombre de crédits-baux arrivant à échéance en avril 2020.

La direction financière a-t-elle dû prendre des mesures particulières dans ce contexte exceptionnel ?

Depuis la mise en place du plan de soutien économique  des pouvoirs publics mi-mars, un certain nombre des locataires des immeubles constitutifs de nos portefeuilles bénéficie du droit de reporter provisoirement le paiement de leurs loyers. Il s’agit de commerçants et de petites et moyennes entreprises. La direction financière de PAREF s’implique non seulement dans le traitement de ces dossiers dans le strict respect des ordonnances prises par le gouvernement, mais encore dans l’évaluation, au moyen d’audits récurrents, des risques d’insolvabilité et de non-recouvrement. Heureusement, les demandes de suspension provisoire d’échéances ne concernent qu’une fraction des locataires de nos actifs détenus en propre comme de notre revenu locatif net – de 6,6 millions d’euros en 2019, constant sur un an –, les cas de contentieux potentiels sont rares et une part très significative de nos locataires sont des entreprises de premier plan solides du point de vue financier.

Dans le même temps, la direction financière et d’autres directions de PAREF ont effectué conjointement des tests de résistance — stress tests et crash tests — sur un certain nombre de SCPI du groupe pour en vérifier la résilience. Ceux-ci, bâtis à l’aide de nombreux scénarios d’anticipation, ont confirmé la capacité de l’ensemble de ces fonds à distribuer un dividende au titre du premier trimestre 2020.

Afin de rendre compte au mieux de l’incidence des événements actuels sur les opérations du groupe, nous avons avancé de deux semaines, à fin mars, la publication de notre document d’enregistrement universel (URD), auquel ont été joints des communiqués de presse sous format papier et des posts sur divers réseaux sociaux. Les échanges avec les actionnaires stratégiques de l’entreprise sont, pour leur part, facilités par le fait que ces derniers ne sont que quatre au total. Deux d’entre eux sont d’ailleurs représentés au sein de notre conseil d’administration. En mars, celui-ci a été réuni en amont de la publication de l’URD et une revue de la situation du groupe a pu être réalisée. 

En tant que société d’investissements immobiliers cotée, PAREF est dans l’obligation de distribuer des dividendes sur le résultat provenant des opérations immobilières. Mais nous avons fait le choix de la mesure : alors que notre résultat net a fortement progressé en 2019, le dividende par action versé cette année au titre du précédent exercice n’augmentera que de 3,9 %, à 4 euros. En outre, ces dividendes pourront être versés en numéraire ou en actions. 

La fiche d’identité de PAREF

Activités  

exploitation en propre d’actifs immobiliers, gestion de fonds pour compte de tiers particuliers et institutionnels sous formes de SCPI et d’OPCI

Chiffre d’affaires 2019  

40,3 millions d’euros, en progression de 14 % sur un an

Place de cotation  

Euronext Paris, compartiment C, depuis 2005

Actionnariat à fin 2019 

Fosun International Limited (59,71 %), Anjour Saint-Honoré (17,34 %), Financière Chatel (5,49 %) et Degroof Petercam Asset Management (2,49 %)

Principaux pays et zones d’implantation

France, Suisse

Principaux marchés

France, Allemagne, et Italie

PAREF teste la résistance de ses fonds

Alors que certains locataires de ses actifs immobiliers peuvent faire face à des difficultés pour payer dans les temps leurs échéances locatives, le groupe PAREF réalise depuis quelques semaines des tests de résistance (stress tests) sur plusieurs des SCPI dont il a la gestion. «L’exercice consiste à collecter des données relatives aux décalages ou suspensions de paiement sollicités par nos locataires, à leur santé financière, aux frais engagés pour l’administration ou la rénovation des immeubles ou encore aux charges liées à leur financement, explique Antoine Onfray, directeur général délégué. Ces données sont ensuite analysées à l’aune de scénarios d’anticipation pondérés selon leur probabilité de réalisation. Nous disposons ainsi d’une bonne lecture de l’avenir, et ce quelle que soit l’évolution des événements.»

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