On sait qu’en ce qui concerne les créances nées d’une décision de justice, la règle est que la créance doit être considérée comme certaine – donc être enregistrée – dès le jugement de première instance qui en fixe le montant, même si la partie adverse a fait appel. L’appel peut toutefois justifier la constitution d’une provision en fin d’exercice.
Qu’en est-il de l’indemnité provisionnelle reçue dans le cadre de la procédure d’expropriation d’urgence, régie par le Code de l’expropriation, pour cause d’utilité publique ?
Cette procédure s’accompagne en effet de la fixation, par le juge de l’expropriation, d’une indemnité qui peut être soit définitive si le juge s’estime suffisamment éclairé, soit seulement provisionnelle (L. 15-4 ancien et L. 232-1 nouveau du code précité). Dans ce dernier cas, les indemnités définitives sont fixées ultérieurement.
Au cas particulier, des sociétés avaient reçu en 2012 des indemnités d’expropriation provisoires, fixées par le juge dans le cadre de la procédure d’urgence précitée. Le montant définitif de l’indemnité avait été fixé amiablement par les parties par un accord intervenu en 2013. Les sociétés avaient alors déduit extra-comptablement de leur exercice clos en 2013 les indemnités, estimant à tort que ces sommes n’étaient pas imposables. A l’issue d’une vérification portant sur les exercices 2013 à 2015 (ou 2013 à 2014 pour l’une d’entre elles), ces sociétés ont été redressées au titre de l’exercice 2013 sur le montant de l’indemnité définitive. Elles estimaient néanmoins que le montant correspondant à l’indemnité provisionnelle aurait pu seulement être taxé en 2012, date du jugement en prononçant le montant.
A juste titre, juge le Conseil d’Etat (3 juin 2022, n°452708) statuant contre l’avis de son rapporteur public, car si l’indemnité d’expropriation accordée par le juge de l’expropriation dans le cadre de la procédure d’urgence précitée a un caractère provisionnel, cette circonstance, eu égard à la portée de la décision du juge de l’expropriation, est...