Introduit par l’une des ordonnances Macron du 22 septembre 2017 (n° 2017-1385), l’accord de performance collectif (APC) se présente comme un outil d’adaptation aux évolutions de l’activité des entreprises, destiné à « répondre aux nécessités liées au fonctionnement de l’entreprise en vue de préserver ou de développer l’emploi », en matière uniquement de durée du travail, rémunération et mobilité professionnelle ou géographique interne à l’entreprise. La particularité de l’APC réside dans son mécanisme de substitution des stipulations de l’accord aux clauses contraires ou incompatibles du contrat de travail. Ainsi, même si le contrat de travail prévoit des stipulations plus favorables, les clauses contraires de l’APC s’y substituent de plein droit, sous réserve que le salarié y consente. En cas de refus, l’employeur conserve la faculté de licencier le salarié pour un motif sui generis qui caractérise une cause réelle et sérieuse, selon la procédure propre au licenciement pour motif personnel.
Bien que suscitant d’épineuses questions juridiques, ce dispositif n’a nourri que peu de contentieux. C’est pourquoi l’arrêt rendu par la cour d’appel de Nancy le 6 février 2023 apporte un éclairage particulièrement utile.
En l’espèce, le litige concernait une entreprise intervenant dans le secteur de la construction modulaire affectée sur deux sites distant de 185 km. Placée en redressement judiciaire, l’entreprise, après avoir d’abord engagé un plan de licenciement collectif pour motif économique, avait ensuite conclu avec les deux élus titulaires de son comité économique et social (CSE) un « accord de performance collective de mobilité interne » le 9 juin 2020. Cet accord, visant à regrouper les deux établissements sur un site unique, prévoyait des mesures d’accompagnement à la mobilité géographique. Trois des quatre salariés concernés avaient refusé de signer l’avenant modifiant leur lieu de travail, ce qui avait conduit à leur licenciement pour motif personnel. Deux d’entre eux avaient, parallèlement à une action prud’homale en contestation de leur licenciement, assigné devant le tribunal judiciaire l’employeur et les deux élus du CSE, afin d’annulation de l’accord collectif.
La question ainsi posée au tribunal judiciaire de Bar-le-Duc, puis à la cour de Nancy portait d’abord sur le point de savoir s’il pouvait être recouru à un APC dans le cadre d’une fermeture de site et dans l’affirmative à quelles conditions. Relevant que le législateur n’avait instauré aucune limite...