Par un arrêt du 12 juin 2014, la Cour de justice de l’Union européenne («CJUE») a prononcé la contrariété à la liberté d’établissement du régime d’imposition des groupes de sociétés des Pays-Bas, dans la mesure où ne peuvent en bénéficier deux sociétés sœurs établies aux Pays-Bas mais détenues par une même société mère établie en Allemagne.
Par Siamak Mostafavi, avocat associé et Nicolas André, avocat, Jones Day(1).
Après un bref rappel de la jurisprudence de la CJUE s’agissant des régimes d’imposition des groupes de sociétés mis en place par différents Etats membres de l’Union Européenne (1), nous analyserons le raisonnement de la CJUE dans son arrêt du 12 juin 2014 (ainsi que celui des conclusions de son avocat général (2)) (2) puis nous envisagerons brièvement sa portée au regard du régime français de l’intégration fiscale (3).
1. Avant l’arrêt du 12 juin 2014 : les régimes d’imposition des groupes de sociétés dans la jurisprudence de la CJUE
L’arrêt du 12 juin 2014 s’inscrit dans ce qui constitue à présent un véritable courant de jurisprudence de la CJUE, dont l’objet est la compatibilité des régimes d’imposition des groupes de sociétés mis en place par différents Etats membres de l’Union européenne avec le principe de liberté d’établissement, et à laquelle appartiennent notamment les décisions Papillon(3) et X Holding(4). Dans son arrêt Papillon, la CJUE, saisie par le Conseil d’Etat, avait considéré que l’interdiction faite à une société mère résidente d’un Etat membre de l’Union européenne d’intégrer une sous-filiale résidente du même Etat membre mais détenue par une filiale établie dans un autre Etat membre était incompatible avec le principe de liberté d’établissement dès lors que cette restriction ne constituait pas une mesure proportionnée pour assurer la cohérence du système fiscal national concerné.
A l’inverse, dans son arrêt X Holding, la CJUE avait jugé que le régime de consolidation fiscale néerlandais («fiscale eenheid») ne pouvait pas être étendu à des filiales établies dans un autre...