L’article L. 210-6 du Code de commerce organise la reprise par les sociétés nouvelles des actes qui ont été conclus pour leur compte par leurs associés antérieurement à la naissance de leur personnalité morale, laquelle coïncide avec l’immatriculation au registre du commerce et des sociétés. Les actes ainsi repris sont réputés avoir été dès l’origine passés par la société, organisant ainsi une sorte de « rétroactivité » juridique de sa constitution, mais à l’égard des seuls actes pour lesquels les formalités de reprise ont été respectées.
En matière fiscale, les effets juridiques de cette procédure ne sont pas ignorés : on peut notamment en voir la trace dans une décision de principe par laquelle le Conseil d’Etat a admis qu’un apport partiel d’actif peut rétroagir à une date antérieure à la date d’immatriculation de la société bénéficiaire (CE 29 juin 2011, n° 317212, Sté Maurice Agofroy) : les stipulations statutaires selon lesquelles « les actes accomplis par la société pendant la période de constitution et repris par la société seront rattachés à son premier exercice » ayant justifié que soit reconnu l’effet fiscal de l’apport à une date antérieure à l’immatriculation, telle que fixée par le traité d’apport signé postérieurement aux statuts.
Par une décision récente, la cour administrative d’appel de Nantes poursuit la construction jurisprudentielle en la matière, à propos des conditions dans lesquelles une société nouvelle peut opérer la déduction de la TVA ayant grevé des opérations passées pour son compte avant son immatriculation (CA Nantes 14 novembre 2023, n° 22NT01164, Les Jardins de Lucile). La société en cause, une société civile de construction-vente (SCCV), n’avait été immatriculée qu’en octobre 2018 et elle avait, lors du dépôt de sa première déclaration de chiffre d’affaires CA3 au titre d’octobre 2018, déclaré comme TVA déductible la taxe ayant grevé des factures en lien avec son opération de promotion immobilière depuis le mois de janvier 2014, soit plus de 4 ans avant son immatriculation....