Recrutée en qualité de cuisinière par une société exploitant un restaurant, une salariée avait été licenciée pour faute grave neuf mois après son embauche, en raison de refus réitérés d’accomplir certaines tâches, de plusieurs abandons de poste injustifiés et d’actes d’insubordination. Contestant judiciairement son licenciement, la salariée faisait valoir que son éviction était en réalité une mesure de rétorsion prise alors que quelques jours avant l’engagement de la procédure disciplinaire elle avait déposé plainte pour harcèlement sexuel à l’encontre du responsable du restaurant. Aussi excipait-elle d’une nullité de son licenciement, en se prévalant des dispositions de l’article L. 1153-2 du Code du travail selon lesquelles « aucune personne ayant subi ou refusé de subir des faits de harcèlement sexuel ou ayant, de bonne foi, témoigné de faits de harcèlement sexuel ou relaté de tels faits ne peut faire l’objet de représailles ». La même règle est également prévue s’agissant de faits de harcèlement moral.
Dès lors, il est jugé de manière désormais constante que si l’employeur, aux termes de la lettre de licenciement, reproche au salarié d’avoir signalé ou témoigné de faits de harcèlement, le licenciement est nul de plein droit, peu important que d’autres motifs soient énoncés dans la lettre de licenciement. Ainsi, le licenciement prononcé, ne serait-ce que partiellement, en raison de la dénonciation du harcèlement est nul, sans que le juge n’ait à examiner les autres griefs, la Cour de cassation faisant ainsi application de la théorie dite « du motif contaminant ». Le seul moyen d’échapper à la nullité est pour l’employeur de parvenir à démontrer que le salarié a agi de mauvaise foi, ce qui ne peut résulter de l’absence de faits de harcèlement. Ainsi, la mauvaise foi suppose qu’il soit établi qu’au moment où le salarié dénonce ou témoigne des faits de harcèlement il a connaissance de leur fausseté, cette preuve étant particulièrement difficile à rétablir.
En l’espèce, la cour d’appel avait fait droit à la demande de la salariée, en relevant d’abord la concomitance entre le dépôt de plainte (le 29 octobre 2019) et le licenciement prononcé le 18 novembre 2019, estimant que la plainte de la salariée avait pesé sur la décision de l’employeur. Les juges d’appel avaient ensuite relevé que l’employeur n’établissait pas que la dénonciation avait été effectuée de mauvaise foi, en sorte que le licenciement était entaché de nullité.
Pour autant, il n’était nullement reproché à l’appui du licenciement la plainte déposée par la salariée, laquelle n’était du reste pas même évoquée dans le courrier de rupture qui fixe les termes du litige.