Si le pouvoir exécutif est fondé à édicter des règlements précisant les modalités d’application de la loi fiscale, c’est à la condition de ne pas empiéter sur les prérogatives du législateur et notamment celle de définir l’assiette de l’impôt, qui relève exclusivement de la loi en application de la Constitution. Un arrêt du Conseil d’Etat du 15 avril dernier vient de le rappeler, mettant ainsi tardivement un terme à une controverse ouverte fin 2003.
Par Vincent Agulhon, avocat, Darrois Villey Maillot Brochier.
La loi de finances pour 2004 du 30 décembre 2003 a réformé le régime des plus-values immobilières des particuliers, notamment les plus-values de cession de parts de sociétés à prépondérance immobilière (SPI), en distinguant les SPI fiscalement translucides, qui continuaient de relever du régime des plus-values immobilières, et les SPI soumises à l’IS qui étaient désormais soumises au régime des plus-values mobilières sous réserve de dispositions transitoires pour les cessions intervenant en 2004. Alors que le nouvel article 150 UB définissait les SPI comme les sociétés dont l’actif était principalement constitué d’immeubles ou de droits portant sur ces biens, un décret en date du 31 décembre 2003 insérait à l’annexe II du CGI un article 74 SB disposant qu’était à prépondérance immobilière la société dont l’actif était principalement constitué d’immeubles non pas seulement à la date de sa cession mais plutôt à la clôture de chacun des trois exercices précédents. Ce texte de nature réglementaire introduisait en pratique une condition de durée de détention des immeubles non prévue par la loi et excluait du champ d’application de l’article 150 UB les sociétés nouvelles n’ayant pas encore clos leur troisième exercice social à la date de la cession de leurs titres. Considérant que les limites du pouvoir réglementaire avaient été méconnues, une association professionnelle d’avocats fiscalistes (IACF) avait alors demandé au Conseil d’Etat l’annulation de l’article 74 SB dans le cadre d’un recours pour excès de pouvoir. Sa demande fût rejetée sans analyse au fond, la haute juridiction ne reconnaissant pas à cette association un intérêt personnel à agir.