Le Conseil d’Etat vient de rendre une nouvelle décision au sujet des problématiques de distributions de capitaux propres financées par emprunt. Les enseignements à en tirer sont nombreux, tant en matière transactionnelle que contentieuse.
Par Jean-Charles Benois, avocat associé, CMS Francis Lefebvre Avocats
La question des modalités de financement des opérations de haut de bilan (distributions de réserves ou de primes, rachats-annulations par la société émettrice de ses propres titres, etc.) constitue depuis longtemps un sujet de débat entre les entreprises et les services vérificateurs, ces derniers tentant, sur les fondements alternatifs des théories de l’acte anormal de gestion ou de l’abus de droit, de remettre en cause la déductibilité des charges financières supportées en cas de recours à l’endettement.
1. Rappel des principes
Au cours des dernières décennies, et en particulier depuis 2012, les juridictions administratives sont venues tracer les contours d’une grille d’analyse qui pourrait se résumer comme un subtil exercice d’équilibre entre deux exigences :
– d’une part, les principes de liberté de gestion des entreprises et de non-immixtion de l’administration les autorisent à choisir le mode de financement qui leur paraît le plus approprié pour réaliser leurs opérations ;
– d’autre part, la déductibilité des charges supportées à raison du financement des opérations engagées peut cependant être contestée si les opérations considérées sont artificielles ou poursuivent un but exclusivement fiscal en s’appuyant sur une analyse littérale des textes contraire à l’intention de leurs auteurs (définition de l’abus de droit dont on rappelle qu’elle a été élargie depuis la loi de finances pour 2019 avec l’adoption de nouveaux articles qui s’ajoutent à la définition traditionnelle), ou bien si elles ne sont pas conformes à l’intérêt de l’entreprise (théorie de l’acte anormal de gestion).