Percevoir sa rémunération via une structure interposée constituée à cette fin est un schéma populaire auprès des dirigeants de sociétés en raison des avantages qui en résultent. Sa mise en place doit cependant se faire avec grand soin si l’on veut conjurer tout risque de remise en cause par les services fiscaux.
Est-il possible pour un dirigeant d’entreprise d’être rémunéré pour les fonctions qu’il exerce non pas directement mais par l’intermédiaire d’une société constituée à cet effet dont il est le principal, sinon le seul, associé ?
A cette question, l’administration fiscale a longtemps répondu par la négative, en considérant que les fonctions ainsi assurées par le dirigeant entraient dans le cadre normal de ses attributions et que, s’il avait renoncé à être directement rémunéré par la société qu’il dirige, il ne pouvait prétendre l’être par une structure interposée.
L’administration faisait ainsi valoir que les sommes attribuées à la structure en cause constituaient un « acte anormal de gestion » et qu’elles n’étaient pas déductibles des résultats de la société versante.
L’administration fondait ses prétentions sur un arrêt rendu par la CAA de Nancy qui avait tranché en ce sens1.
Le Conseil d’Etat, dans une décision de principe rendue en octobre 20232, était revenu sur cette position en jugeant que si la rémunération versée à la structure interposée n’était pas différente de celle qu’aurait perçue le dirigeant et qu’elle correspondait à de véritables prestations rendues par celui-ci, cela ne pouvait constituer un « acte anormal de gestion » de la part de l’entreprise versante. Les sommes en cause étaient donc déductibles du résultat de celle-ci sous réserve, naturellement, qu’elles ne soient pas excessives au regard des services rendus.
Il convient toutefois de faire preuve en la matière d’une certaine prudence, pour les raisons suivantes.
Tout d’abord, l’administration ne semble pas avoir renoncé à contester un tel schéma et elle est parfois suivie par les juridictions.
Ainsi la CAA de Nancy a-t-elle jugé qu’une telle rémunération ne pouvait être versée à la structure constituée à cette fin car les statuts de la société prévoyaient qu’elle était dirigée et administrée par un président qui avait tout pouvoir pour la représenter à l’égard des tiers, formulation assez habituelle3.