Dans un pays où l’instabilité de la norme constitue la principale constante de l’environnement fiscal, nombreuses sont les interventions du législateur pour créer puis pour supprimer ou restreindre un régime fiscal avantageux au détriment des intérêts financiers des contribuables concernés.
Par Vincent Agulhon, avocat, Darrois Villey Maillot Brochier
Au regard du droit interne, y compris constitutionnel, les contribuables n’ont pas droit, en effet, au maintien indéfini de tels avantages. L’incertitude fiscale s’illustre notamment par la «petite rétroactivité» des lois de finances. Quelque choquante qu’elle soit, cette pratique ne heurte pas les principes juridiques et constitutionnels et seule la sagesse du pouvoir exécutif peut en préserver les contribuables par une forme d’autocensure vertueuse souvent annoncée, mais moins souvent mise en pratique avec constance. Les grandes entreprises auront à cet égard apprécié le report annoncé de la réduction du taux normal d’IS les concernant, pourtant déjà votée pour prendre effet en 2019, auquel la section des Finances du Conseil d’Etat n’a rien trouvé à redire dans son avis du 28 février sur le projet de loi désormais en cours de discussion. Les engagements internationaux de la France peuvent cependant, parfois, poser des limites à l’exercice brutal par l’Etat de ses prérogatives fiscales. Le respect du droit de propriété, érigé en principe fondamental par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (article 1er du 1er protocole additionnel), peut ainsi être invoqué par les contribuables. Son champ d’application en matière fiscale reste étroit : il ne suffit pas, en effet, de constater une modification défavorable de la législation fiscale pour être fondé à se plaindre...