La Cour de justice de l’Union européenne subordonne l’imputation des pertes d’une filiale étrangère liquidée ou absorbée à l’impossibilité d’une valorisation de ces pertes au moyen d’une cession à un tiers.
Par Daniel Gutmann, avocat associé, CMS Francis Lefebvre Avocats
1. Contexte jurisprudentiel
On se souvient que dans sa décision Marks & Spencer (CJCE, 13 décembre 2005, C-446/03), la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a jugé qu’une législation qui permet à une société mère de déduire les pertes des filiales résidentes, mais non celles de filiales non-résidentes détenues dans les mêmes conditions, est conforme au droit de l’Union européenne, mais que l’exigence de proportionnalité oblige l’Etat de la société mère à permettre l’imputation de ces déficits européens lorsque la filiale étrangère a épuisé, dans son Etat de résidence, toutes les possibilités de prise en compte de ses pertes. Les pertes étrangères imputables selon ce raisonnement doivent donc revêtir un caractère «définitif», au sens où l’entend la jurisprudence.
Le point 55 de l’arrêt Marks & Spencer précise à cet égard que pour établir le caractère définitif des pertes des filiales étrangères dont elle demande l’imputation, la société mère doit démontrer :
– que la filiale non-résidente a épuisé les possibilités de prise en compte des pertes qui existent dans son Etat de résidence au titre de l’exercice fiscal concerné par la demande de dégrèvement ainsi que des exercices fiscaux antérieurs, le cas échéant au moyen d’un transfert de ces pertes à un tiers ou de l’imputation desdites pertes sur des bénéfices réalisés par la filiale au cours d’exercices antérieurs ;
– et qu’il n’existe pas de possibilité pour que les pertes de la filiale étrangère puissent être prises en compte dans son Etat de résidence au titre des exercices futurs soit par elle-même, soit par un tiers, notamment en cas de cession de la filiale à celui-ci.
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