le droit à l’oubli sur Internet traduit l’application d’une directive européenne à une société de droit californien. En termes d’«e-réputation», elle ouvre de nouveaux droits, notamment aux dirigeants d’entreprises.
Par Olivier Cousi, avocat associé, Gide Loyrette Nouel et avec la collaboration de Maxime d’Angelo.
1. La protection de l’«e-réputation» a vu le jour avec l’essor du web 2.0
Le miroir vertigineux d’Internet pouvant déformer la réalité (informations erronées, incomplètes, mal présentées, dénigrantes ou obsolètes) ou l’exposer trop crûment (souvenir de jeunesse, photo volée, déclaration inconsidérée, etc.) l’idée d’un «droit à l’oubli» a fait son chemin. En France, en 2010, une «Charte consacrée au droit à l’oubli numérique» est signée et impose aux moteurs de recherche de désindexer les pages dont les contenus ont fait l’objet d’une demande de suppression, mais ni Google ni Facebook ne la signent. Trois ans plus tard, la Commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures du Parlement européen adopte un «Paquet» sur les données personnelles, qui vise à réformer la directive de 1995 sur la protection des données à caractère personnel (datant d’une époque où l’Internet n’est pas aussi développé qu’aujourd’hui) et instaure une innovation pour les e-citoyens : le droit de demander aux responsables des traitements la suppression de données, de copies de données et de liens vers ces données s’il n’existe aucun motif légitime de les conserver.
C’est dans ce contexte de réforme de la directive 95/46/CE et de revendication d’un droit à l’oubli numérique que la CJUE a rendu son arrêt (CJUE, grande chambre, affaire C-131/12, 13 mai 2014, Google Spain SL, Google Inc. contre Agencia Espanola de Proteccion de Datos (AEPD), Mario Costeja Gonzalez). Trois questions se posaient : la directive 95/46/CE est-elle applicable aux activités du...