Le 22 mai dernier, la Cour de cassation a rendu un arrêt qui étend aux SARL (après les SA et SAS) la transférabilité de la responsabilité pénale d’une société absorbée vers la société absorbante en cas de fusion-absorption. Cette évolution de la jurisprudence s’inscrit dans une dynamique qui pourrait, à terme, concerner toutes les sociétés commerciales.
Un récent arrêt de la Cour de cassation renforce la jurisprudence en vertu de laquelle une société absorbante peut éventuellement devenir pénalement responsable de faits commis par la société absorbée dans le cadre d’une opération de fusion-absorption. Faut-il s’inquiéter de cette évolution ?
Alexis Werl : L’arrêt qui a été rendu le 22 mai dernier par la Cour de cassation s’inscrit dans le prolongement d’un précédent arrêt, rendu en novembre 2020, qui avait opéré un revirement majeur de la jurisprudence de la Cour de cassation en matière de responsabilité pénale des personnes morales.
Avant l’arrêt de novembre 2020, les juges français privilégiaient une approche anthropomorphique de la personne morale, en appréciant la responsabilité pénale de celle-ci sur le modèle de la personne physique. A cet égard, la responsabilité pénale d’une personne physique ne se transmet pas à ses héritiers, en vertu du principe cardinal selon lequel nul ne peut être responsable pénalement du fait d’autrui. Jusqu’en 2020, la responsabilité pénale d’une personne morale n’était donc pas davantage transmissible, et cela, y compris en cas d’absorption. La responsabilité pénale disparaissait avec la personne, en cas de décès de la personne physique ou de dissolution de la personne morale.
Mais en 2020, la Cour de cassation a délaissé cette logique anthropomorphique pour adopter une logique économique : elle considère que dès lors qu’une absorption entraîne le transfert de l’activité économique de la...