Par Damien Luqué, avocat au sein de l’équipe Services financiers. Il intervient dans la structuration de véhicules immobiliers (OPCI, SCPI, FPS) au bénéfice de sociétés de gestion ou d’établissements financiers.
Alors que l’article L. 533-22-1 du Code monétaire et financier («CMF»), dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte (la «loi sur la transition énergétique»), n’avait pas pour objectif de s’appliquer aux sociétés de gestion d’organismes de placement collectif immobilier («OPCI») ou de sociétés civiles de placement immobilier («SCPI»), l’article 173 VI de la loi sur la transition énergétique semble étendre, de façon indirecte, la nécessité pour les gérants de fonds immobiliers de prendre en compte les critères relatifs aux objectifs environnementaux, sociaux et de gouvernance dans leur politique d’investissement.
A ce jour, l’article L. 533-22-1 du CMF prévoit seulement que les sociétés de gestion gérant des organismes de placement collectif en valeurs mobilières («OPCVM»), des fonds d’investissement alternatifs («FIA») prenant la forme de fonds d’investissement à vocation générale, de fonds de capital investissement, de fonds de fonds alternatifs, de fonds professionnel spécialisé, de fonds professionnel de capital investissement, de fonds professionnel à vocation générale ou encore de fonds d’épargne salariale doivent mettre à la disposition de leurs porteurs et/ou actionnaires :
«[…] une information sur les modalités de prise en compte dans leur politique d’investissement des critères relatifs au respect d’objectifs sociaux, environnementaux et de qualité de gouvernance [«les critères ESG»].
Elles [les sociétés de gestion] précisent la nature de ces critères et la façon dont elles les appliquent selon une présentation fixée par Décret».
Cette rédaction écarte donc expressément les contraintes d’information relatives aux critères ESG pour les sociétés de gestion d’OPCI et de SCPI.
L’article 173 VI de la loi sur la transition énergétique vient compléter ce texte en étendant l’obligation d’information relative aux critères ESG à un ensemble d’investisseurs institutionnels/clients professionnels.
Le nouvel alinéa 3 de l’article L. 533-22-1 du CMF disposera ainsi, à compter de son entrée en vigueur (soit dès l’exercice clos au 31 décembre 2016), que :
«Les entreprises d’assurance et de réassurance régies par le Code des assurances, les mutuelles ou unions régies par le Code de la mutualité, les institutions de prévoyance et leurs unions régies par le Code de la sécurité sociale, les sociétés d’investissement à capital variable, la Caisse des dépôts et consignations, les institutions de retraite complémentaire régies par le Code de la sécurité sociale, l’institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l’Etat et des collectivités publiques, l’établissement public gérant le régime public de retraite additionnel obligatoire et la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales mentionnent dans leur rapport annuel et mettent à la disposition de leurs souscripteurs une information sur les modalités de prise en compte dans leur politique d’investissement des [critères ESG] […]».
Bien que cette nouvelle rédaction ne vise pas expressément les sociétés de gestion d’OPCI et de SCPI, l’extension des contraintes d’information relatives aux critères ESG aux clients institutionnels de ces sociétés de gestion aura pour conséquence d’imposer aux gérants de fonds immobiliers d’ajuster leurs contraintes d’investissement aux critères ESG et de s’organiser sur un plan opérationnel afin de pouvoir adresser à leur client l’ensemble des informations relatives aux critères ESG devant être, à leur tour, communiquées aux souscripteurs.
Le décret n° 2015-1850 du 29 décembre 2015 pris en application de l’article L. 533-22-1 du CMF modifie, quant à lui, l’article D. 533-16-1 du même code et précise les informations que devront publier les investisseurs institutionnels sur leur prise en compte des critères ESG.