Le marché des fonds indiciels cotés vole de record en record, porté par une collecte toujours très dynamique. L’Europe tire tout particulièrement son épingle du jeu grâce à l’ESG1. L’éclairage de Bertrand Alfandari, responsable du développement des ETF chez BNP Paribas Asset Management.
Quelles sont les principales tendances récentes du marché des ETF ?

L’année 2021 a été exceptionnelle. Au niveau mondial, les ETF2 ont atteint un encours record de 10 000 milliards de dollars fin 2021, en hausse de 30 % sur un an. En Europe, ils représentent 1 500 milliards de dollars d’actifs sous gestion, soit une croissance de 26 %. Celle-ci a été portée à la fois par une collecte historique et par un effet marché, tous deux liés à la bonne performance des indices actions.
Sur les deux premiers mois de 2022, la demande d’ETF reste très soutenue : en Europe, la collecte nette a déjà rejoint le niveau des deux premiers mois de l’année dernière3. Et les derniers évènements liés à la crise sanitaire et à la guerre en Ukraine n’ont pas affecté l’intérêt porté aux ETF. Le fait que ces derniers aient réussi à traverser la crise de liquidité du printemps 2020 sans incident majeur a rassuré les investisseurs sur leur capacité à traverser les périodes de forte volatilité.
Quelle place occupe aujourd’hui l’investissement responsable sur ce marché des ETF ?
Le poids des ETF ESG ne cesse de croître et l’Europe joue un rôle de leader sur ce segment puisqu’elle y représente à elle seule la moitié des produits listés dans le monde, 60 % des encours et les deux tiers de la collecte. Le développement de l’ESG au sein des ETF a été très rapide ces trois dernières années : plus de la moitié de la collecte des ETF européens est allée vers des produits ESG en 20213. Ce n’est donc pas un phénomène de mode.
Comment accompagnez-vous ce mouvement chez BNP Paribas Asset Management ?
Depuis mi-2017, tous nos nouveaux ETF intègrent systématiquement des critères ESG. En complément, nous avons transformé plusieurs de nos fonds existants pour les rendre ESG, notamment notre ETF sur le CAC 40 qui réplique, depuis septembre 2021 déjà, le CAC 40 ESG proposé par Euronext. Fin 2021, 83 % de nos encours étaient ainsi classés dans les catégories « article 8 ou article 9 » du règlement SFDR. Nous proposons plusieurs approches aux investisseurs : une gamme d’ETF répliquant des indices larges intégrant une méthodologie ESG de type « best-in-class » : les sociétés sont sélectionnées en tenant compte de critères extra-financiers mais la pondération sectorielle de l’ETF reste proche de celle de l’indice non ISR équivalent. D’autres investisseurs, en parallèle, souhaitent des biais plus marqués autour d’une thématique d’investissement spécifique ; c’est ainsi que nous avons créé dès 2008 un ETF sur un indice bas carbone. Plus récemment, nous avons lancé des ETF sur différentes thématiques ESG comme l’économie circulaire, l’économie bleue ou encore les infrastructures ESG, et nous continuons d’élargir notre gamme de façon dynamique.
Justement, quels sont vos derniers lancements ?
Nous venons de lancer deux ETF actions thématiques, tous deux ESG. Le premier porte sur les technologies médicales. Il est composé de 50 valeurs mondiales présentes dans les biotechnologies, les outils et services pour les sciences de la vie, ou les équipements et technologies des soins de santé. Le second est dédié à l’économie durable de l’hydrogène. Il est composé de 30 valeurs mondiales, actives dans la production ou le stockage d’hydrogène vert, complétées de 10 autres spécialisées dans les énergies propres, indispensables à la production d’hydrogène vert. Enfin, le tout dernier né de notre gamme ESG est un ETF obligataire investi dans des obligations vertes, sociales et durables. Nous ne voulions pas nous limiter aux obligations seulement « vertes » car la dimension sociale nous semble aujourd’hui essentielle.
Quelles sont les perspectives du marché français des ETF ?
Aujourd’hui, c’est encore un marché dominé par les investisseurs professionnels (institutionnels, gérants d’actifs), mais on assiste à une montée en puissance des intermédiaires financiers (CGP, banques privées, gestion sous mandat, robo-conseillers). Et les particuliers eux-mêmes, dans le cadre de leur gestion libre, se saisissent progressivement de ces produits. C’est ce qui permettra au marché français et plus largement européen – qui ne représente encore que 15 % du marché mondial – de devenir une place centrale en gestion indicielle, à l’instar de ce qu’on observe en matière spécifiquement d’ETF ESG où l’Europe est clairement la locomotive mondiale.
1 - ESG : environnement, social et gouvernance.
2 - ETF : fonds listé en bourse.
3 - Source : ETFGI, rapports du 31/12/2021 et du 28/02/2022.