Des Gilets jaunes à la crise Covid, l’actualité récente a rappelé l’importance que revêt le facteur social lorsqu’il s’agit d’évaluer les risques et opportunités d’un investissement. Conscients de l’enjeu, les asset managers essaient de mieux prendre en compte cette dimension. Mais les obstacles sont nombreux.
Les trois lettres qui caractérisent l’investissement responsable ne laissent pas de place au doute : dans l’acronyme ESG, à côté du « E » de l’environnement et du « G » de la gouvernance, on trouve bien le « S » pour inclure les aspects sociaux dans les décisions d’investissement. Dans la pratique pourtant, le triptyque est bien souvent bancal, avec un focus plus fort sur le G et le E dans les analyses extra-financières des gérants. « Historiquement, les investisseurs se sont d’abord intéressés au sujet de la gouvernance, y compris les questions d’éthique des affaires, car elle avait un impact direct sur la performance économique de l’entreprise, rappelle Jean-Philippe Desmartin, directeur de l’investissement responsable chez Edmond de Rothschild Asset Management. Avec l’accord de Paris, les sujets environnementaux sont devenus très visibles, principalement sous l’angle du climat mais aussi, de plus en plus, sous ceux de la biodiversité et de l’eau. » Le pilier social, quant à lui, était bien moins fréquemment mis en avant.
«Appréhender la réalité sociale d’une entreprise est difficile pour un investisseur : il existe des labels mais il n’est pas certain qu’ils reflètent bien l’attractivité réelle d’un employeur. »
Le déclencheur de la crise sanitaire
Du moins jusqu’ici : dès 2019, certains investisseurs ont commencé à prendre conscience que le « S » ne pouvait pas rester le parent pauvre de l’ESG. La multiplication des mouvements sociaux, notamment en France, a montré que le sujet était loin d’être déconnecté de la performance des entreprises. « Avec la crise des Gilets jaunes et le blocage de l’économie qu’elle a provoqué, un lien direct commence aussi à apparaître entre [les] modèles d’affaires et le...