Evaluer la performance extra-financière des Etats revient souvent à favoriser les pays à plus hauts revenus et à laisser de côté ceux qui auraient pourtant besoin de capitaux pour se développer. Conscients de ces biais, certains asset managers ont revu leurs méthodologies ESG sur les souverains. Ils réfléchissent aussi à étendre leurs actions d’engagement à ce type d’émetteur.
Y aurait-il, en matière d’investissement responsable, un « éléphant dans la pièce », selon l’expression anglaise consacrée ? A l’heure du « tout ESG », les asset managers européens, très diserts lorsqu’il s’agit de parler de leurs efforts pour gérer de manière plus durable leurs portefeuilles d’actions et d’obligations d’entreprises, restent assez discrets sur leur approche ESG des émetteurs souverains. Ce sont pourtant près de 50 000 milliards de dollars d’encours de dette gouvernementale qui irriguent les marchés financiers mondiaux, selon le décompte de la Banque des règlements internationaux. Dette que l’on retrouve massivement dans le bilan des investisseurs institutionnels.
Des approches perfectibles
Les gestionnaires d’actifs ne partent bien sûr pas d’une page vierge en la matière : des méthodologies d’analyse ont été développées pour couvrir les portefeuilles souverains. Mais elles souffrent de plusieurs limites. « Les scores ESG des Etats sont fortement corrélés à leurs PIB, comme l’a notamment mis en évidence une étude de la Banque mondiale en 2021 », pointe Karim Carmoun, président de Robeco France. Cela tend à flécher les investissements vers les émetteurs les plus riches, car ils sont mieux notés, tenant à l’écart les pays émergents qui ont pourtant besoin de capitaux pour assurer leur transition. Une dichotomie qui peut être accentuée par les choix méthodologiques des gérants. « Il peut être problématique de pondérer de la même manière un critère comme celui de l’accès à l’eau potable dans...