Fait original pour une ETI, le spécialiste des services en métrologie, Trescal, sous LBO, s’appuie sur son équipe de trois personnes pour piloter sa stratégie de fusions-acquisitions. Une solution qui lui permet de limiter le recours aux conseils externes.
Après les Etats-Unis en décembre, Trescal (215 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2015), poursuit ses emplettes outre-Atlantique. L’ETI spécialisée dans les services de métrologie a en effet annoncé début janvier l’acquisition de la PME Primo Instrument, lui permettant de s’implanter sur le territoire canadien. Fait original, cette opération s’appuie sur une équipe interne de trois personnes. En effet, cette ancienne division d’Air Liquide, qui a pris son indépendance en 2007 grâce au soutien du fonds d’investissement Alstorg, avait déjà décidé six mois avant cette opération de recruter une personne spécifiquement en charge des opérations de fusions-acquisitions. Anticipant un important travail de fusions-acquisitions, le président de Trescal, Olivier Delrieu, a ainsi recruté Guillaume Caroit en qualité de directeur M&A (voir portrait en encadré). Depuis, Trescal a réalisé pas moins de vingt-cinq acquisitions en huit ans ! Après un deuxième LBO avec 3i en 2010, des discussions se sont ouvertes en 2013 avec un nouvel actionnaire, Ardian. «Lorsque nous élaborions le business plan quelques mois avant cette opération, l’ambition affichée par Ardian de doubler la taille de Trescal en cinq ans a fait que le renforcement de l’équipe M&A s’est imposé comme une évidence», explique Guillaume Caroit. Deux personnes sont ainsi venues compléter l’équipe M&A (voir encadré). Directement rattachée à la direction générale dans la mesure où le directeur M&A est également directeur général délégué, cette équipe complémentaire travaille au sein de Trescal avec la directrice juridique en fin de processus, ainsi qu’avec le trésorier, et, dans une moindre mesure, avec la direction financière. Elle fait par ailleurs appel à quelques spécialistes : l’un des big four pour la partie comptable, un avocat local pour l’aspect juridique, et enfin des spécialistes internes pour la réalisation de la due diligence à la fois technique et informatique.
Une identification des cibles facilitée
Dans certains cas seulement, l’équipe M&A doit recourir à une banque d’affaires. «Dans des zones géographiques que nous ne connaissons pas, comme c’était le cas au Brésil, nous avons besoin de leurs services, précise Guillaume Caroit. Nous avions également envisagé un temps de nous implanter en Pologne, et compte tenu du fait que les dirigeants parlent rarement anglais et qu’il existe de très nombreuses cibles de petite taille, nous avions demandé à une banque d’affaires de réaliser le travail de sélection.» Si aucune acquisition n’aura finalement été faite en Pologne, le recours à cette banque aura toutefois permis à l’ETI d’approcher un marché mal connu.
En revanche, dans la majorité des cas, l’équipe M&A se dispense de conseils externes.«Nous nous chargeons de l’ensemble des phases de l’opération, signale Guillaume Caroit. Les build-up que nous réalisons étant compris entre un et dix millions d’euros, ils ne nécessitent pas de faire appel à des banques d’affaires, d’autant plus que nous exerçons un métier de niche relativement peu connu de ces dernières. Il nous est en outre aisé d’identifier les vendeurs qui s’interrogent sur une possibilité de succession.» Dans certains cas, l’équipe M&A fait en ce sens appel à des dirigeants de certaines de ses filiales. «Par exemple, le responsable de Trescal en Allemagne étant en poste depuis dix ans bénéficie de contacts réguliers avec ses concurrents, signale Guillaume Caroit. Ces derniers le sollicitent directement lorsqu’ils souhaitent vendre leur société. Pour une acquisition que nous sommes en passe de réaliser, ce professionnel m’avait prévenu de la volonté d’une entreprise d’intégrer le groupe. Je me suis alors rendu sur place pour présenter la société et répondre aux questions du propriétaire.» Ce même cas de figure se rencontre au Canada où le dirigeant de filiale connaît parfaitement le marché et contacte régulièrement l’équipe M&A pour l’informer des cibles potentielles. En revanche, dans d’autres zones géographiques, la mission de repérage prend plus de temps. «Pour identifier les cibles dans d’autre pays d’Europe où nous ne sommes pas déjà installés ou aux Etats-Unis, je me rends sur place directement, souligne Guillaume Caroit. Je mène ensuite les négociations seul, parfois néanmoins accompagné du directeur général lorsqu’il s’agit d’acquisitions de taille importante.» Un cas de figure qui pourrait être amené à se reproduire prochainement dans la mesure où Trescal envisage de s’implanter en Asie dès 2017 !
Des profils complémentaires
- L’équipe M&A de Trescal s’est successivement renforcée par le recrutement de deux profils différents. «Début 2013, l’ancien directeur général France de Trescal, Federico Levenson, m’a d’abord rejoint, indique Guillaume Caroit, directeur M&A. Il disposait d’une très bonne connaissance de la métrologie, mais devait acquérir l’aspect technique des fusions-acquisitions. Nous avons quelques mois plus tard recruté un profil junior, Léonard de La Hosseraye, pour occuper un poste d’analyste. Diplômé de l’ESCP, il bénéficiait d’une expérience en banque d’affaires mais ne connaissait pas le domaine de la métrologie.»
- Tandis que le premier a aujourd’hui en charge les opérations menées en Espagne, et, plus récemment, une opération effectuée au Brésil, l’analyste assiste quant à lui le directeur M&A pour les acquisitions réalisées dans les autres pays d’Europe, ainsi qu’en Amérique du Nord. «Il sélectionne les cibles dans cette zone géographique, établit parfois le premier contact avec elles pour évaluer leur taille et présenter Trescal, puis gère les auditeurs qui interviennent pendant l’opération, ainsi que la production de documents et la rédaction de la note à l’intention du pool bancaire, détaille Guillaume Caroit. Il conduit en outre des études sur les marchés peu connus de l’équipe.»
Guillaume Caroit à la tête de l’équipe M&A
Diplômé d’HEC en 1995, Guillaume Caroit débute sa carrière chez L’Oréal en tant que contrôleur de gestion. Il devient ensuite consultant en stratégie pendant six ans chez A.T. Kearney. «Au sein de ce cabinet de conseil américain, j’ai conduit des missions de due diligence qui m’ont beaucoup apporté dans la suite de ma carrière en M&A quant à l’analyse du marché et les aspects stratégiques à considérer en amont du deal, explique Guillaume Caroit. J’ai également mené des missions d’amélioration opérationnelle pour des groupes industriels ou en grande distribution. Une expérience sur laquelle je m’appuie aujourd’hui pour l’intégration et la mise en œuvre de synergies après une acquisition.» En 2005, il rejoint le groupe de matériau de construction Materis, appartenant à la société d’investissement Wendel. «J’ai occupé divers postes, notamment aux acquisitions de la branche mortiers pour laquelle j’ai participé à deux opérations en Angleterre d’environ 5 millions d’euros de chiffre d’affaires chacune», indique Guillaume Caroit. Il intègre Trescal en 2007 en tant que secrétaire général et occupe désormais la fonction de directeur M&A et directeur général délégué du groupe en charge de superviser les Etats-Unis, l’Italie et l’Espagne.