Afin de former un grand nombre de collaborateurs à des sujets financiers parfois ardus, les directeurs financiers recourent de plus en plus à des modules informatiques disponibles en ligne, dits de e-learning. Cette solution a le mérite, pour l’entreprise, de limiter les frais engagés et, pour les utilisateurs, d’être flexible et ludique.
Enseigner les étapes clés d’une opération de fusion-acquisition à de nombreux financiers chez Sanofi, améliorer la compréhension de l’outil de gestion utilisé par près de 2 000 personnes chez Seb ou encore sensibiliser les chefs de projet aux enjeux financiers chez Total… Pour répondre à ces besoins, qui représentent un défi de taille en termes d’organisation pour la direction financière, ces trois groupes ont choisi de recourir à une solution d’e-learning, une formation dispensée grâce à un logiciel spécialisé, accessible en ligne et interactif. Ils ne sont pas les seuls. De plus en plus de groupes s’y intéressent, principalement sous la pression de l’optimisation des coûts.
Former des centaines, voire des milliers de personnes en louant une salle, en réservant des chambres d’hôtel et en payant des animateurs engendre en effet de lourdes dépenses. Certes, certaines entreprises ont réagi en limitant le nombre de ces événements. Cependant, les directeurs financiers ne peuvent renoncer complètement à la formation, qui est un moyen indispensable pour diffuser les procédures et la culture financière au sein du groupe, et maintenir ainsi la rentabilité de l’entreprise. Proposant un juste milieu entre ces deux objectifs, le e-learning permet de poursuivre les formations tout en allégeant la facture.
Une formation moins chère
Les directeurs financiers se sont d’abord intéressés à cet outil pour remplacer des formations très récurrentes. En effet, certains sujets se prêtent particulièrement à ce mode d’enseignement en ligne. Le suivi des normes et évolutions réglementaires, qui sont des problématiques communes à de nombreuses entreprises, est depuis des années proposé sous forme de e-learning clé en main. L’éditeur Demos offre par exemple des programmes sur la TVA, les normes IFRS ou encore la directive MIF. Les missions essentielles de la fonction finance sont également propices à ce genre d’enseignement. Cegid propose, pour sa part, des formations ayant pour thème comment bâtir les prévisions de trésorerie, couvrir le risque de change ou exploiter les indicateurs de performance. L’avantage est que ces solutions, produites de manière standardisée par les éditeurs, sont moins chères, car elles ne nécessitent pas de développement informatique supplémentaire. En outre, les financiers peuvent y accéder quand et où ils le souhaitent, sans que cela impacte leurs tâches quotidiennes.
Des études de cas complémentaires
Outre ces solutions génériques, les directeurs financiers peuvent également opter pour des logiciels de e-learning complémentaires à une formation traditionnelle. Certains prestataires proposent ainsi des enseignements «physiques» qui se déroulent en deux jours, au lieu de trois pour un programme classique, puis sont complétés par des études de cas de 30 minutes environ, à réaliser en ligne. Ils permettent aux utilisateurs de se tester par rapport aux compétences transmises lors de l’enseignement sur des thématiques telles que l’analyse financière, la détection d’une crise de trésorerie ou la gestion des risques de change, comme chez Cegos. «Si cette offre est disponible depuis quelques années, la demande s’accroît car cela permet de diminuer le nombre de jours de cours, qui coûtent chers et mobilisent les équipes», explique Michel Sion, responsable des formations finance chez le spécialiste des formations professionnelles.
Une volonté de sur-mesure
De grandes entreprises, dont la direction financière est conséquente, décident même de développer des solutions de e-learning créées spécialement pour elles. Si ces formations peuvent porter sur de nombreux sujets, les directeurs financiers cherchent souvent à mettre en place des programmes visant à faciliter des missions complexes comme les fusions-acquisitions. Ainsi, Sanofi a créé pour son université interne, dénommée «Finance Academy», une formation en la matière pour l’ensemble des financiers. «Nous avons développé un contenu adapté à la société, du graphisme proposé aux situations concrètes étudiées», précise Yves Leheurteux, responsable du pôle sur mesure chez Demos. Ainsi, les financiers peuvent accéder aux quatre étapes d’une opération de fusion-acquisition, due diligences, évaluation, accord d’acquisition et intégration, selon un cas construit en collaboration avec la direction financière. «Ce genre de produit est co-construit, poursuit Yves Leheurteux. Nous scénarisons et développons la formation à partir de l’expertise des financiers du groupe, selon les besoins définis par le directeur financier.» Ainsi, pour 45 000 euros, Sanofi dispose désormais d’un complément des enseignements dispensés par son université interne, sous forme d’études de cas réalisable en 80 minutes.
En parallèle, de plus en plus de directions financières ont également recours au e-learning afin de former les financiers d’une filiale récemment acquise aux pratiques financières du siège. «Nous enregistrons beaucoup de demandes concernant notre solution, adaptable au cas de chaque société, afin d’apprendre aux collaborateurs les normes comptables utilisées, les méthodes de reporting sur le nouvel ERP ou les règles d’investissement du groupe qu’ils rejoignent», confirme Gabriel Danon, responsable commercial France-Suisse de l’éditeur européen Intuition. Ils peuvent ainsi procéder à quelques essais «à blanc» avant de mettre en œuvre les procédures de leur nouvelle entreprise. Des atouts qui devraient favoriser un développement rapide de ce nouveau mode de formation, y compris pour un public plus large que la fonction finance, pour s’assurer notamment que les opérationnels soient bien «en ligne» avec les procédures financières.
Le jeu comme moyen de sensibiliser les opérationnels
Convaincu de l’intérêt des formations en ligne pour leurs propres équipes, les directeurs financiers commencent à monter des programmes adaptés, en insistant sur leur côté simple d’accès et ludique, à destination des opérationnels. Ils entendent sensibiliser ces derniers à l’enjeu de leurs décisions sur la rentabilité de l’entreprise.
Ainsi, Seb s’est illustré en la matière en formant près de 2 000 personnes à travers le monde, dont 1 700 opérationnels, à l’usage de son outil informatique de gestion, afin qu’ils prennent mieux en compte certaines données financières comme les effets de changes ou le calcul des frais de revient.
Total, pour sa part, dispose d’un jeu pour démontrer à ses chefs de projets que la finance n’est pas une contrainte mais un outil indispensable pour mener à bien une mission. Il a été développé en partenariat avec l’Institut français du pétrole Energies nouvelles. «Pour ces derniers, la finance semblait souvent très éloignée de leurs enjeux quotidiens, témoigne Jordane Paquet, directeur associé d’Interaction Games. Nous avons donc conçu un scénario au plus près de leurs préoccupations quotidiennes.» L’utilisateur joue le rôle d’un chef de projet sur un site d’extraction de pétrole et doit déterminer le budget, gérer les achats de matériels et choisir les prestataires. Il est également confronté à un retard de livraison et à un accident de chantier. Le scénario évolue ensuite en fonction de chaque décision du joueur, qui montre concrètement l’impact que peut avoir leur décision sur les finances du groupe.
Un groupe américain de distribution spécialisé a également fait appel à cet outil de e-learning pour former les managers de la filiale française au contrôle interne, en conformité avec les normes Sarbanes Oxley. «Le groupe manquait de traçabilité concernant les transactions avec les clients, précise Chritian Gayton, président de Qoveo, qui a réalisé le logiciel. Grâce au jeu, nous simulons des situations courantes à risques, telles que l’octroi de marchandises à un artisan sans mise à jour immédiate du système d’information, le manager ne pouvant plus alors justifier des écarts de stocks en cas d’audit.»