Expertise/Epargne retraite

Trois critères pour optimiser le PER

Publié le 23 juin 2023 à 11h30

Ingrid Labuzan    Temps de lecture 7 minutes

Moins plébiscité par les sociétés que le plan épargne entreprise, le plan épargne retraite a pourtant de nombreux atouts. Le dispositif fiscal qui l’accompagne est le premier qui vient à l’esprit, mais il ne faudrait pas pour autant négliger les divers leviers qui permettent d’optimiser ce dispositif d’épargne de long terme.

Si la gestion pilotée existait déjà avant la loi Pacte, elle n’était jusque-là guère utilisée. Disponible sur les articles 83 par exemple, elle n’était en revanche jamais instaurée par défaut. La loi Pacte marque donc un véritable tournant en instaurant ce mécanisme qui comporte de nombreux avantages, s’il est correctement monitoré.

Une gestion pilotée efficace

Sur le PERO, la gestion pilotée équilibrée est l’option automatiquement présélectionnée ; ce profil impliquant des placements sur les marchés financiers. Cette gestion diffère des choix principalement réalisés par les épargnants avant Pacte, ceux-ci privilégiant les fonds euros. « La question de l’adhésion à cette gestion équilibrée se posait donc, et l’on observe qu’elle est bien là », remarque Benjamin Sanson, sales leader retraite et investissement chez Mercer France. La société accompagne les entreprises, notamment de plus de 250 salariés, dans la mise en place, l’optimisation et la formation autour des dispositifs d’épargne salariale et retraite. Sur la totalité de ses clients, 95 % restent sur l’option équilibrée présélectionnée. « Les 5 % restants optent pour une gestion libre, afin de panacher eux-mêmes leur allocation. Mais personne ne retourne à 100 % sur du fonds euros, ce qui est positif, car la gestion équilibrée est adaptée à un investissement de long terme et délivre de la performance. »

La performance moyenne des grilles de gestion équilibrée est en effet attractive, notamment en 2020 et 2021, années qui ont suivi l’entrée en vigueur de la loi Pacte. « En revanche, 2022 a été plus compliquée sur les marchés et nous commençons à recevoir des questions de la part des entreprises. Un important travail de pédagogie va s’avérer nécessaire pour expliquer pourquoi il ne faut pas pour autant revenir sur des fonds euros », confie Benjamin Sanson. Le rôle de la gestion pilotée, notamment avec un profil équilibré, est en effet d’amortir les mouvements de marché dans la durée. « Sortir maintenant de sa gestion équilibrée pour du fonds euros reviendrait à fixer ses pertes », alerte le représentant de Mercer.

Cette baisse des marchés doit-elle inquiéter ceux dont le départ à la retraite approche ? En théorie non, car le propre de la gestion pilotée est justement de sécuriser l’épargne sur plusieurs années avant la date de la retraite. Néanmoins, tous les procédés de sécurisation ne se valent pas, souligne Benjamin Sanson. « Si l’épargne est sécurisée via des fonds euros, il n’y a pas de craintes majeures à avoir face aux mouvements des marchés. En revanche, certains assureurs ont panaché des fonds euros et divers types de fonds obligataires dans cette phase de sécurisation. Là, les risques de variation de la performance sont nettement plus importants. » La gestion pilotée ne doit donc pas signifier un désintérêt total de la part de l’épargnant et implique de vérifier en amont certains points, notamment les conditions de sécurisation de l’épargne à l’approche de la retraite.

Le bon usage des versements volontaires

Les versements volontaires sur les PER demeurent encore largement motivés par l’avantage fiscal associé, ce qui conduit les épargnants à placer leurs sommes en un seul versement, en fin d’année. « La plupart de ces épargnants réitèrent leur versement volontaire chaque année. Ce dernier serait beaucoup plus efficace s’il était réparti sur 12 mois. » Fractionner les versements permet en effet de lisser les points d’entrée et donc d’atténuer les mouvements de marché. La solution la plus adéquate, en période de constitution d’épargne, est donc de privilégier les virements programmés.

Encourager les entreprises à valoriser leurs dispositifs

« La retraite a occupé l’actualité mais, paradoxalement, les discussions en entreprise sur les cotisations et abondements aux dispositifs de retraite collective ont été rares. L’inflation a en effet été le premier sujet traité. » Les entreprises accusent encore un certain retard dans la mise en avant de leurs dispositifs d’épargne retraite auprès de leurs salariés, dispositifs pourtant avantageux. « Pour remédier à cela, le choix du partenaire est crucial. Il doit travailler main dans la main avec la société pour informer et accompagner le salarié », confie Benjamin Sanson. Il remarque d’ailleurs que, malgré des outils de simulation toujours plus efficaces disponibles sur les plateformes des acteurs de l’épargne retraite, ceux-ci sont peu utilisés par les épargnants. Pourtant, les chiffres demeurent l’un des meilleurs arguments pour convaincre les salariés de se pencher sur leur épargne retraite.

« Je conseille également aux entreprises et aux salariés d’agréger tous leurs produits d’épargne, qu’elle soit salariale ou retraite collective et individuelle, chez un même gestionnaire. Cela permet d’avoir une vision globale sur l’effort d’épargne et le capital ou la rente qui sera ensuite disponible. » Cette harmonisation implique la présence d’un interlocuteur unique sur les sujets d’épargne, ce qui facilite la communication et la pédagogie auprès des salariés. « Il est important de multiplier ces occasions de communiquer, encore trop rares. Elles sont pourtant indispensables pour impulser une véritable vision de long terme. »

Questions à…Benjamin Sanson, sales leader retraite et investissement, Mercer France

Diplômé de l’ESA, Benjamin Sanson s’est spécialisé dans le conseil en épargne entreprise après une première expérience dans l’audit. Il rejoint Mercer en 2014 en tant que consultant, spécialiste de la retraite et de l’épargne salariale. Il accompagne aujourd’hui le développement commercial de l’ensemble des offres retraite et investissement de Mercer en France.

« Supports et versements : faire les bons choix d’épargne »

L’offre de fonds dans les supports d’épargne retraite ne cesse de s’étoffer, le choix n’est pas toujours aisé pour l’épargnant. Y a-t-il des critères auxquels être attentif ?

Je ne vais pas revenir sur les critères classiques de performance ou d’horizon. En revanche, je voudrais signaler un point important. Récemment, le niveau de risque des fonds d’investissement, le SRI (synthetic risk indicator), a été abaissé. Cela signifie qu’un même fonds a vu sa note de risque reculer. On trouve ainsi sur le marché des fonds actions internationales précédemment notés entre 5 et 7 qui ont désormais une note de 4. Cela s’explique par la réglementation, par la manière de composer cette note SRI. Désormais, outre la nature du produit et son risque de marché, son risque crédit est également intégré. Or, ce dernier est plus faible et a tendance à abaisser la note finale, alors que le profil de risque du produit n’a pas changé. Il faut donc faire preuve d’une attention accrue au moment de la sélection des fonds. Le niveau de risque d’un portefeuille peut être plus élevé dans les faits que ce que la note SRI laisse supposer.

Outre le choix des produits, le choix des solutions d’épargne est également crucial. Comment arbitrer ?

Le choix entre une assurance vie et un PER dépend de considérations personnelles. Néanmoins, il est important de rappeler qu’il vaut mieux privilégier les supports d’épargne collectifs, proposés par l’entreprise, plutôt que les individuels. En effet, les supports collectifs ont des frais beaucoup moins élevés car mutualisés et une offre de fonds souvent plus intéressante ou diversifiée. De plus, la surveillance exercée sur les performances des supports est souvent plus exigeante quand elle est traitée via des dispositifs proposés par l’entreprise. Si aucun Perco n’est disponible, le Perin demeure un excellent moyen de préparer sa retraite à titre personnel. Il est plus intéressant d’ouvrir ce produit d’épargne plutôt que de réaliser des versements sur le PEE s’il n’y a pas d’abondement de l’entreprise. Une fois qu’un PEE est ouvert, souscrire à un dispositif d’épargne retraite collectif n’est pas très cher pour une entreprise, il serait dommage qu’elle s’en prive. 

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