Le régime de l’intégration fiscale a, de manière régulière, fait l’objet de modifications volontaires de la part du législateur et de précisions de la part du juge national, sans que sa philosophie ou son économie n’en soit altérée. Mais, sous l’impulsion de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), le législateur a été contraint dans un premier temps d’étendre son périmètre aux filiales françaises détenues par l’intermédiaire d’une société résidente d’un Etat de l’Union européenne (UE)1, puis de permettre la constitution d’un groupe entre sociétés françaises détenues à 95 % au moins par une société mère résidente d’un Etat de l’UE2.
Par Charles Ménard, avocat associé, et Jérôme Ardouin, avocat, directeur associé, EY Société d’Avocats
Toutefois, ces modifications, certes substantielles, n’ont pas remis en cause les principes qui gouvernent depuis 1988 l’intégration fiscale.
Tel n’a pas été le cas de l’arrêt Steria dans lequel la CJUE a jugé que l’exonération de quote-part de frais et charges de 5 % sur les dividendes distribués entre sociétés membres du groupe ne constituait pas un avantage inhérent à l’intégration fiscale3.
Plus récemment encore, dans la décision Layher4, le Conseil constitutionnel a jugé contraire à la Constitution l’exonération de contribution de 3 % réservée aux distributions entre sociétés membres d’un groupe fiscal intégré, motif pris notamment que, cette contribution étant un impôt autonome, distinct de l’impôt sur les sociétés (IS), son exonération était «sans lien avec le régime de l’intégration fiscale, qui ne concerne que l’impôt sur les sociétés et n’a pas pour objet d’exonérer de cet impôt les sociétés membres d’un groupe. Par conséquent, lorsque la condition de détention [à 95 %] est satisfaite, les sociétés d’un même groupe réalisant, en son sein, des distributions sont placées au regard de l’objet de la contribution dans la même situation, que ce groupe relève ou non de l’intégration fiscale».
Cette décision devrait certes conduire le législateur à modifier cette année le régime de la contribution de 3 %, mais le raisonnement qui y est suivi invite à questionner la pertinence de la référence faite par le législateur à l’appartenance à un groupe fiscal intégré pour régler le champ d’application d’un impôt ou taxe autre que l’IS. Il en va ainsi par exemple des modalités de détermination de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE).