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Prix de transfert

La fausse bonne idée de la procédure de régularisation en matière de prix de transfert

Publié le 23 octobre 2015 à 16h44

Sabine Sardou, Bird & Bird

La procédure de régularisation en matière de prix de transfert semble une bonne idée pour les contribuables. Toutefois, en prévoyant le rapatriement des sommes de l’étranger vers la France, elle vient créer une insécurité juridique dans les pays qui sont les contreparties du flux de l’entité française redressée.

Par Sabine Sardou, avocat associé, Bird & Bird

Les redressements fiscaux en matière de prix de transfert entraînent systématiquement une double imposition économique, en France et dans l’autre pays contrepartie du flux, et ce en matière d’impôt sur les sociétés (IS).

En outre, considérant que les sommes redressées ont indument été transférées à l’étranger, l’administration fiscale française applique une retenue à la source (RAS) sur ces revenus «réputés distribués». C’est la double peine (IS + RAS).

La loi de finances rectificative pour 2014, reprenant une ancienne pratique de la direction des vérifications nationales et internationales (DVNI) appelée «cascade internationale», vient mettre fin à la double peine en prévoyant une procédure de régularisation. Cette procédure aboutit à un dégrèvement de plein droit de la RAS en cas de reversement à l’entité française des sommes redressées, par la société contrepartie du flux (1).

1. Une procédure en apparence positive et constructive

Pour bénéficier de cette procédure, des conditions cumulatives, précisées très récemment (2), doivent être respectées :

  1. le contribuable doit faire une demande écrite auprès de l’administration fiscale française avant la mise en recouvrement des rappels de retenue à la source. Selon un modèle type proposé par l’administration, cette demande doit faire l’objet de plusieurs mentions comprenant, notamment, les exercices fiscaux concernés, les revenus concernés ainsi que le montant de la retenue à la source applicable à ces revenus et les pénalités afférentes ;

  2. la société doit accepter sans réserve les rectifications notifiées et les pénalités afférentes ;

  3. le rapatriement des sommes qualifiées de revenus distribués doit intervenir dans un délai de 60 jours à compter de la signature de l’accord avec l’administration ;

  4. la société versante ne doit pas être située dans un Etat ou un territoire non coopératif au sens de l’article 238-0 A à la période au titre de laquelle les revenus sont qualifiés de distribués.

La doctrine administrative vient apporter trois précisions au texte de loi : d’une part concernant l’entité versante, d’autre part, sur la forme du versement et, enfin, sur la preuve du versement.

  • Pour être éligible à cette procédure, seule la société contrepartie du flux intragroupe qui a généré le redressement fiscal est habilitée à procéder au versement. Ici, l’administration répond à certains montages de groupes internationaux visant à organiser les reversements des sommes par d’autres entités du groupe, de manière opportuniste.

  • Deux formes de reversement seulement sont admises : par virement effectif des sommes dans les comptes de la société vérifiée ou par extinction d’une dette de la société vérifiée envers la société bénéficiaire. Dès lors, ce rapatriement ne pourra pas être réalisé sous forme d’un apport en compte courant ni sous forme de prêt au profit de la société vérifiée.

  • Enfin, ce rapatriement devra être justifié en délivrant un extrait de relevé de compte bancaire faisant état du crédit du compte de l’entreprise et un extrait de comptabilité de l’entreprise qui enregistre l’opération permettant d’identifier clairement la nature et le montant du versement effectué ou/et de la dette faisant l’objet d’une minoration ;

Outre le dégrèvement de la retenue à la source, l’intérêt affiché de cette procédure de régularisation est, pour les sociétés vérifiées, de régler plus vite les procédures de contrôle en matière de prix de transfert, et pour le Trésor, de permettre un encaissement immédiat des droits notifiés en matière d’IS et de pénalités (3).

2. Sauf exception, qui transfère le risque fiscal à l’étranger

Cette procédure, bien qu’avantageuse en théorie pour la société française et pour le Trésor, pose un certain nombre d’interrogations qui sont, pour la plupart, inhérentes à son caractère unilatéral. Il s’agit d’une procédure basée exclusivement sur la relation entre société...

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