Quelles sont les conséquences d’un régime incitatif instaurant une exonération de plus-values, lorsque le contribuable concerné ne réalise pas un gain mais une perte ?
Par Eloïse Turot, avocat, CMS Bureau Francis Lefebvre
Lorsqu’une personne détenait avec son conjoint, leurs ascendants et leurs descendants, des droits dépassant un certain seuil dans les bénéfices sociaux d’une société soumise à l’IS, et qu’elle cédait ces droits à l’un des membres précités de son groupe familial, la plus-value réalisée à l’occasion de cette cession était, jusqu’à l’intervention de la loi de finances pour 2014, totalement exonérée, sous réserve d’une condition de conservation des titres pendant un délai de cinq ans (exonération prévue au 3 du I de l’article 150-0 A du Code général des impôts (CGI)).
Un contribuable ayant constaté, à l’occasion de cessions répondant à l’ensemble de ces conditions, non pas des plus-values mais des moins-values, les avait imputées sur des plus-values réalisées par ailleurs au titre des mêmes années.
L’administration a remis en cause cette imputation sur le fondement de l’abus de droit, les suppléments d’impôt sur le revenu étant donc assortis d’une majoration de 80 %. Le raisonnement de l’administration était le suivant : les moins-values en cause résultaient d’opérations réalisées dans le groupe familial, relevant d’un régime d’exonération ; si elles avaient donné lieu à plus-values, celles-ci auraient été exonérées d’impôt sur le revenu. Or, le contribuable avait imputé ces moins-values sur des plus-values qui étaient, elles, imposables : selon l’administration, ces plus-values n’étaient pas «de même nature» au sens du 11 de l’article 150-0 D du CGI.
Mais le Conseil d’Etat a au...