Dans une décision du 15 novembre 2016 rendue en grande chambre (A et B c. Norvège, n° 24130/11 et 29758/11), la Cour européenne des droits de l’homme infléchit sa jurisprudence en admettant plus largement qu’auparavant le cumul des sanctions pénales et fiscales.
Par Daniel Gutmann, avocat associé, CMS Bureau Francis Lefebvre
On sait qu’en vertu de l’article 4 du Protocole n° 7 à la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH), «nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement par les juridictions du même Etat en raison d’une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ou condamné par un jugement définitif conformément à la loi et à la procédure pénale de cet Etat». La Cour EDH en a conclu qu’une personne ayant fait l’objet d’une condamnation pénale pour des faits de fraude fiscale ne pouvait faire l’objet de poursuites ultérieures pour les mêmes faits et conduisant à de nouvelles sanctions prenant la forme de pénalités fiscales susceptibles d’être regardées comme des sanctions pénales au regard de la CEDH (v. notamment 27 nov. 2014, n° 7356/110, Lucky Dev c/ Suède et 27 janv. 2015, n° 17039/13, Rinas c/ Finlande). Il semblait donc que dans l’hypothèse inverse, où un contribuable aurait fait l’objet de sanctions fiscales devenues définitives, une poursuite pénale était également impossible.
La Cour EDH a toutefois décidé, par l’arrêt du 15 novembre précité, que le Protocole n° 7 «ne bannit pas les systèmes juridiques qui traitent de manière intégrée […] le méfait néfaste pour la société […] en réprimant celui-ci dans le cadre de phases parallèles menées par des autorités différentes à des fins différentes». En présence d’un cumul de procédures pénale et fiscale unies par un «lien matériel et temporel suffisamment étroit», il n’y aurait donc pas, à proprement parler, de «répétition» de...