Alors que les entreprises de plus de 130 pays doivent déjà transmettre à leur administration fiscale de référence leur reporting fiscal pays par pays, l’Union européenne est en passe de franchir un cap en imposant la publicité de ce document pour ses groupes ressortissants. Une mesure envisagée depuis 2016, dont l’adoption a donné lieu à de nombreux débats, et qui reste loin de faire l’unanimité.
«Nos concurrents américains et asiatiques doivent se frotter les mains. » Ce directeur financier d’un groupe du CAC 40 ne décolère pas face à la décision de l’Union européenne qui, le mois dernier, a validé l’obligation pour les entreprises réalisant au moins 750 millions d’euros de chiffre d’affaires de rendre public leur reporting pays par pays (CbCR). Si la mesure suscite l’émoi parmi les dirigeants de groupes européens, c’est parce qu’elle va les contraindre à communiquer sur leur site Internet des informations sensibles (chiffre d’affaires, impôts sur les bénéfices, nombre de salariés…) pour chaque pays où ceux-ci sont présents – avec une ventilation par pays au sein de l’UE et une agrégation des données relatives aux pays situés en dehors d’Europe.
Problème : une telle disposition n’existe nulle part ailleurs dans le monde ! Vivement critiquée pour son manque de réciprocité, cette « innovation » européenne ne constitue pourtant pas une surprise. En effet, la Commission et le Parlement européens cherchaient à la faire adopter depuis près de six ans !
L’électrochoc des « Panama Papers »
Sa genèse remonte à 2015, lorsque l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), missionnée par le G20 pour proposer aux gouvernements des mesures destinées à mettre fin aux pratiques d’optimisation fiscale dites « abusives » de certaines entreprises, publie un rapport dans lequel la création d’un CbCR est proposée. « A l’époque, des discussions entre les chefs de gouvernement et d’Etat avaient déjà eu...