Après plusieurs années de blocage, une majorité d’Etats membres de l’Union européenne se sont entendus fin février pour rendre publics les reportings fiscaux pays par pays publiés par les grandes entreprises du continent. Une mesure dénoncée par ces dernières, qui redoutent que leurs concurrents internationaux, en particuliers américains et asiatiques, n’en tirent profit.
Mais quelle mouche a encore piqué les dirigeants européens ? En pleine recrudescence du nombre de contaminations à la Covid-19 dans plusieurs Etats, les ministres européens des Finances n’ont rien trouvé de mieux, lors d’un Conseil « Compétitivité » du 25 février dernier, que de s’accorder sur un sujet aussi sensible pour les entreprises que dénué d’intérêt pour le bien-être des citoyens européens : l’obligation pour les groupes réalisant un chiffre d’affaires consolidé d’au moins 750 millions d’euros de rendre public leur reporting fiscal pays par pays (« country by country reporting », ou CBCR).
Sous la pression d’ONG
Contenant des informations stratégiques propres à chacun des pays où les multinationales sont présentes (chiffre d’affaires, nombre de salariés, résultat avant impôt, impôts acquittés…), ce document existe depuis 2015. Mais, conformément à l’accord conclu à l’époque par une centaine d’Etats dans le cadre du plan de lutte contre les pratiques d’évasion fiscale et d’optimisation fiscale agressive des grands groupes internationaux mis en œuvre par l’OCDE (plan BEPS), il n’est destiné qu’aux administrations fiscales et reste donc, à ce titre, confidentiel. L’Union européenne est ainsi la première juridiction à opter pour sa publicité en ce qui concerne ses propres ressortissants !
Ce projet était sur la table depuis plusieurs années déjà. Dès 2016, le Parlement français avait tenté d’imposer la publicité du CBCR des grands groupes hexagonaux dans le cadre de la loi Sapin 2. Mais cette...