Une jurisprudence inachevée.
Il est des jurisprudences dont l’influence sur les acteurs économiques tient à l’éclairage de leurs solutions autant qu’à l’obscurité des aspects non jugés.
Certes, il est aujourd’hui clair que le transfert en cours de bail d’un terrain par le bailleur au preneur vaut, fiscalement, résiliation du bail préalable à ce transfert. Le bailleur est donc imposable sur le loyer en nature né, fiscalement, d’une remise gratuite de la construction, et, symétriquement, le preneur doit, à son bilan fiscal, sortir à son prix de revient la construction qu’il a édifiée, pour l’y rentrer ensuite à sa valeur vénale.
Tout aussi claire est cette même imposition du bailleur, confirmée par le Conseil d’Etat le 18 juillet 2023 (décision n° 470360), lorsque le terrain est cédé à un tiers ayant également acquis les droits du preneur, au terme d’une opération d’achat réputée unique.
Le clair-obscur persistant de la jurisprudence
Pour autant, dans cette situation tripartite, cette jurisprudence ne porte que sur le bailleur, et ignore les situations fiscales du preneur et de l’acheteur.
Or, comment traduire, en impôts sur les sociétés et sur le revenu, le traitement symétrique qui s’induit de la jurisprudence bipartite initiale, dans une situation, tripartite, où preneur et acheteur sont distincts ? De qui, du bailleur ou du preneur, l’acquéreur tiers a-t-il acquis la propriété fiscale de la construction ? Voici, parmi d’autres, des questions fiscales soulevées par cette opération.
La décision du 18 juillet 2023 confirme en creux combien est nécessaire la réponse à ces questions. Il est des œuvres inabouties qui ont vocation à être terminées : ainsi, le Requiem de Mozart, achevé par ses élèves. Telle sera, nous l’espérons, cette jurisprudence bipartite transposée à une situation tripartite. En l’état, faute de disposer des compléments fiscaux attendus, le recours à ces schémas reste à déconseiller.