La lettre des fusions-acquisition et du private equity

La lettre des fusions-acquisitions et du private equity - Juin 2020

Covid-19 : impacts sur les opérations de M&A

Publié le 12 juin 2020 à 16h34

Bruno Dondero

Qui imaginait, quelques semaines avant la mise en place du confinement, que notre pays tout entier serait placé quasiment sans préavis en état de stase économique et sociale ? Les professionnels du M&A sont certes habitués à l’inhabituel, au sens où leur métier les conduit à négocier couramment des clauses envisageant le sort de l’opération en cas de survenance d’un événement imprévu. Lorsque leur pratique est internationale, ces professionnels ont croisé leur lot de mesures d’embargo, de guerres civiles ou de guerres tout court, ou bien encore, déjà, d’épidémies.Mais il est tout de même difficile d’accueillir de manière impassible une crise sanitaire mondiale imbriquée dans une crise économique de même calibre.

Bruno Dondero, avocat associé

Différence entre les deux crises : si le coronavirus est susceptible de frapper sans distinction les uns et les autres, la crise économique n’a pas les mêmes effets sur les secteurs d’activité. Tandis que certains secteurs sont entièrement paralysés ou presque (événementiel, restauration, transport), d’autres ne sont que ralentis, voire connaissent une embellie.

Ce constat ayant été fait, on comprend que les aspects juridiques de la crise sont et seront multiples. Ce sont tout d’abord les contrats qui sont affectés. On parle ici aussi bien des contrats et des autres actes juridiques par lesquels se réalise la transmission de l’entreprise que des contrats de l’entreprise elle-même. Les relations avec les fournisseurs, les clients, les bailleurs, sont toutes susceptibles d’être impactées par la double crise du Covid-19. Transmettre une entreprise dont les contrats sont suspendus, ou dont les clients ne peuvent payer, n’est bien entendu pas la même chose que céder une entreprise en régime de croisière. 

A l’intérieur de l’entreprise, les relations sont aussi susceptibles d’évoluer. Comment conserver pour la suite la ressource humaine de l’entreprise dans un contexte d’activité suspendue ou raréfiée ? Les relations entre associés, ou entre associés et partenaires financiers, ou encore avec le marché, sont aussi concernées : peut-on distribuer aujourd’hui les dividendes de l’activité d’hier quand se profile un lendemain très incertain ?

La boîte à outils des juristes des opérations de M&A était déjà amplement dotée en instruments permettant d’appréhender les événements imprévus. L’imprévu pouvait être prévu en somme et, lorsque les clauses diverses (hardship, clauses MAC, garanties, etc.) n’étaient pas en mesure de répondre à la situation, d’autres institutions juridiques telles que la force majeure prenaient le relais. Une particularité de la crise actuelle est d’avoir engendré, sinon une crise juridique, un droit spécial, reposant notamment sur les dizaines d’ordonnances adoptées depuis le mois de mars 2020. Il faut sans tarder prendre la mesure de cette nouvelle situation juridique pour préparer le jour d’après. Si crise il y a, celle-ci sera à l’évidence porteuse aussi de nombreuses opportunités en termes d’acquisition, quitte à ce que le M&A laisse un temps la place au distressed M&A. 


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