Très en vogue auprès des praticiens, la mise en place de conventions de management s’est trouvée fortement freinée par la jurisprudence de la Cour de cassation qui, dans des arrêts remarqués de 2010 et 2012, avait prononcé la nullité de telles conventions conclues par des sociétés anonymes (SA).
Par Jean-Charles Benois, avocat counsel en fiscalité. Il intervient tant en matière de fiscalité des entreprises et groupes de sociétés qu’en fiscalité des transactions et private equity. jean-charles.benois@cms-bfl.com
et Philippe Gosset, avocat en fiscalité. Il intervient tant en matière de fiscalité des transactions et private equity que dans le domaine de la fiscalité des particuliers, actionnaires et dirigeants. philippe.gosset@cms-bfl.com
Très en vogue auprès des praticiens, la mise en place de conventions de management s’est trouvée fortement freinée par la jurisprudence de la Cour de cassation qui, dans des arrêts remarqués de 2010 et 2012, avait prononcé la nullité de telles conventions conclues par des sociétés anonymes (SA).
Saisie à nouveau de la question de leur validité, la Haute juridiction, dans un arrêt du 24 novembre 20151, a précisé sa jurisprudence et insufflé un vent nouveau dans la situation où les conventions de management ne sont pas conclues par des SA mais par des sociétés par actions simplifiées (SAS).
Conventions de management et SA : une relation houleuse
Dans ses arrêts Samo Gestion2 et Mecasonic3 de 2010 et 2012, la Cour de cassation avait jugé nulles, pour défaut de cause, des conventions de management que des SA avaient conclues avec des sociétés tierces et qui portaient sur des fonctions qui relevaient déjà des missions de leurs dirigeants aux termes de leur mandat social.
En l’occurrence, les SA avaient confié la direction générale à des sociétés tierces, dont le dirigeant était la même personne que celle qui occupait le mandat de directeur général au sein des sociétés bénéficiaires des prestations de management.
Les conventions de management faisaient donc, en quelque sorte, «double emploi» avec l’exercice du mandat social, de telle sorte que la rémunération du prestataire n’avait pas, du point de vue juridique tout du moins, de contrepartie réelle.
De là à voir dans le versement de la rémunération du prestataire un acte anormal de gestion, il n’y a qu’un pas… que l’administration fiscale n’hésite pas à franchir.
Certains services vérificateurs se sont ainsi prévalus de cette jurisprudence pour notifier des rejets de déductibilité de management fees facturés par des sociétés de management, lorsqu’il apparaissait que les prestations de direction relevaient de la compétence des dirigeants sociaux.
Face à ce constat, la pratique a évolué et s’est naturellement tournée vers la SAS, plus souple juridiquement et offrant à cet égard quelques solutions intéressantes.
Conventions de management et SAS : un nouveau souffle
Poser la question de la convention de management au sein d’une SAS peut de prime abord surprendre, puisque – particularité de cette forme de société – l’organe de direction peut être composé de personnes morales.
Une société peut donc valablement exercer un mandat social dans une SAS et être rémunérée en conséquence, sans avoir à conclure avec cette dernière une convention de management.
Ainsi, la société prestataire agit directement en tant que mandataire social, de sorte que la jurisprudence précitée de la Cour de cassation ne devrait pas trouver à s’appliquer.
Cependant, il peut arriver qu’une convention de management ait été conclue par une SAS avec une entité tierce.
Dans un tel cas de figure, la Cour de cassation a considéré, dans son arrêt du 24 novembre 2015, qu’une SAS peut valablement confier sa direction générale (et non la présidence) à une société tierce qui ne serait pas titulaire d’un mandat social, dès lors que les statuts de la SAS ne s’y opposent pas.
La solution rendue par la Cour de cassation est bienvenue car elle tend à conforter une pratique qui s’est assez largement répandue au sein des groupes de sociétés.
On peut par ailleurs espérer qu’elle réduise l’appétit des services vérificateurs de l’administration fiscale dans les cas où les contribuables peuvent justifier, d’une part, que les conventions de management ne contredisent pas l’organisation des pouvoirs définie par les statuts et que, d’autre part, les prestations de direction sont effectives, complémentaires de celles rendues par les autres mandataires sociaux (notamment le président) et rémunérées selon des conditions de marché.
1. Cass. Com. 24 novembre 2015, n° 14-19685.
2. Cass. Com. 14 septembre 2010, Samo Gestion, n° 09-16.084.
3. Cass. Com. 23 octobre 2012 Société Mecasonic, n° 11-23.376.