C’est le 17 août prochain que vont entrer en application les nouvelles règles fixées par le règlement européen du 4 juillet 2012 sur les successions internationales.
Par Philippe Laval, avocat, PwC Société d’Avocats
Or, ces successions sont aujourd’hui nombreuses, puisque la Commission européenne fait état d’environ 450 000 successions internationales chaque année dans l’Union européenne.
En effet, une succession prend un caractère international par exemple lorsque le défunt possédait un bien dans un pays autre que celui où il résidait ou dont il avait la nationalité, ou bien encore résidait dans un pays dont il n’avait pas la nationalité, soit des hypothèses devenues très fréquentes de nos jours…
C’est dire qu’il est important de se familiariser avec le nouveau régime juridique qui va s’appliquer aux successions de ce type qui s’ouvriront à compter du 17 août 2015.
Sans entrer dans le détail ni dans les subtilités infinies d’une matière fort complexe, on souhaite simplement ici donner un aperçu des principales nouveautés qu’apporte le règlement européen à la pratique traditionnelle des successions internationales.
Tous les commentateurs s’accordent à dire que, d’une manière générale, l’entrée en vigueur des nouvelles règles va simplifier sensiblement les choses en facilitant la détermination de la loi applicable au règlement de ces successions, qui était jusqu’alors, de l’avis général des praticiens, excessivement compliquée.
Le nouveau règlement rompt en effet radicalement avec le dispositif antérieur sur deux points principalement :
- Le droit international français appliquait tout d’abord des règles différentes selon que la succession portait sur des biens meubles (argent, titres, valeurs mobilières, parts sociales…) ou sur des immeubles : la loi régissant la succession des biens mobiliers était celle du dernier domicile du défunt, tandis que la succession des biens immobiliers devait être réglée selon la loi du pays dans lequel ils sont situés.
Ainsi, par exemple, la succession d’un Français décédant en France et comportant un immeuble situé par exemple en Espagne est réglée par la loi française pour la partie mobilière et pour les immeubles situés en France, et par la loi successorale espagnole pour l’immeuble en Espagne, ce qui, on s’en doute, ne simplifiait pas les choses, les législations successorales applicables dans les différents pays concernés pouvant comporter des différences notables.
Et ce sans compter les éventuels renvois faits par une législation nationale à une autre, le droit international privé des autres pays n’étant pas nécessairement le même que le nôtre…
Tout cela ne contribuait guère à une liquidation rapide et sereine de la succession, on en conviendra aisément.
A cet égard, le nouveau règlement apporte une simplification bienvenue en soumettant l’ensemble des successions ouvertes à compter du 17 août prochain à une unique loi, celle du pays où le défunt avait sa résidence habituelle au moment de son décès. Finie donc la scission successorale entre les biens mobiliers et immobiliers. Désormais (sauf exceptions limitativement définies par le règlement européen), seul le critère de la dernière résidence habituelle du défunt déterminera donc à la fois la compétence et le droit applicable à une succession internationale.
Ainsi, à titre d’exemple, la succession d’un Français résidant en France et ayant des biens dans plusieurs pays sera régie par les seules règles successorales françaises.
Cela permettra sans aucun doute une meilleure visibilité et donc une meilleure anticipation de sa succession.
- La deuxième grande nouveauté est la possibilité désormais ouverte aux citoyens européens, depuis 2012, de mieux organiser à l’avance le règlement de leur succession en la soumettant à la loi du pays dont ils ont la nationalité.
Cette désignation anticipée, qui se fera dans un testament, introduit une souplesse appréciable en la matière. Ainsi, par exemple, un Français résidant dans un autre pays pourra écarter, s’il le souhaite, l’application à sa succession de la loi de ce pays en désignant par testament la loi française, si celle-ci correspond mieux à ses objectifs de transmission familiale.
Naturellement, cela implique une bonne connaissance du droit comparé des successions, ou à tout le moins les conseils avisés d’un spécialiste en la matière…
En effet, les législations successorales peuvent varier de manière plus ou moins sensible sur les règles applicables à la détermination des héritiers, à la protection des enfants (réserve héréditaire) et du conjoint survivant, au rapport des donations, au partage de la succession, etc.
Le règlement européen de 2012 va encore dans le sens de la simplification en créant le certificat successoral européen, grâce auquel tout ressortissant de l’Union européenne pourra faire la preuve de sa qualité d’héritier dans n’importe quel autre Etat membre, sans avoir à faire d’autres formalités pour pouvoir exercer ses droits héréditaires.
Indiquons, pour terminer ce tour d’horizon, que ces nouvelles règles ne s’appliquent qu’au règlement civil des successions internationales, et n’ont pas d’incidence sur le plan fiscal (détermination et paiement des droits de succession).
La fiscalité des successions internationales demeure régie par les législations nationales et les conventions fiscales en vigueur entre les divers pays européens.