Parole d’expert – Alexis Foret, responsable de la gestion high yield chez Edmond de Rothschild Asset Management

« Le rendement des obligations high yield ressort actuellement à 5,5 %. »

Publié le 15 octobre 2024 à 16h30

Edram    Temps de lecture 5 minutes

Parole d’expert – Alexis Foret, responsable de la gestion high yield chez Edmond de Rothschild Asset Management - Entre une croissance économique qui semble globalement résister et des taux d’intérêt en voie de normalisation, le marché du high yield bénéficie aujourd’hui d’un environnement plus avantageux. Pour Alexis Foret, responsable de la gestion high yield chez Edmond de Rothschild Asset Management, les obligations de ce segment, qui offrent des niveaux de rendement attrayants et dont les coupons moyens sont en hausse, ont donc tout pour séduire les investisseurs.

L’environnement de marché actuel est-il favorable pour le segment du high yield ?

Ce segment a successivement connu plusieurs années difficiles, dans un premier temps en raison de la crise sanitaire, puis à cause du conflit entre la Russie et l’Ukraine, et enfin du fait de la hausse des taux d’intérêt enclenchée pour contrer les pressions inflationnistes.

Le contexte est aujourd’hui plus favorable. Les taux d’intérêt retrouvent en effet une trajectoire baissière et ils devraient progressivement se normaliser. De plus, les émetteurs high yield devraient bien résister si le scénario de soft landing qui prévaut aujourd’hui se confirme.

Ces émetteurs, qui étaient restés à l’écart du marché du crédit pendant un certain temps, ont bien anticipé le refinancement du mur de la dette. Le montant des émissions brutes, qui était tombé à 15 milliards d’euros en 2022, a ainsi atteint 45 milliards l’an dernier et 75 milliards cette année (à comparer, historiquement, à 80 milliards pour une année normale). Nous nous attendons à ce que le marché primaire reste dynamique en 2025. Ce mouvement de refinancement a eu pour conséquence un déplacement des maturités des obligations, de 2024-2025 vers 2029-2030, ce qui diminue le risque sur la classe d’actifs.

D’ailleurs, le niveau de taux de défaut, même s’il tend à remonter autour de 3 %, reste modéré et sous contrôle (sauf dans l’hypothèse d’une récession qui serait très préjudiciable pour le marché du high yield). Certes, certaines entreprises, comme Altice, Casino ou encore Atos en France, ont été contraintes de restructurer leur dette, mais les difficultés qu’elles ont rencontrées leur étaient propres et n’ont pas généré d’effet de surprise négatif dommageable pour le marché du high yield dans son ensemble.

Comment les rendements évoluent-ils ?

A l’heure actuelle, le rendement global des obligations high yield ressort à 5,5 %, soit 1 % au-delà de la moyenne des dix dernières années. Le niveau de coupon moyen augmente au fur et à mesure que les entreprises se refinancent. Ainsi, il a atteint 6,5 % pour l’ensemble des émissions qui ont eu lieu depuis le début de l’année 2024.

S’ajoute à cela le fait que les obligations à haut rendement affichent une sensibilité relativement faible aux taux d’intérêt, autour de 3 ans, ce qui est inférieur à celle des obligations investment grade.

Pour toutes ces raisons, l’exposition au segment du high yield tend donc à remonter dans les allocations d’actifs, d’autant que les investisseurs doivent trouver des alternatives aux fonds monétaires dont les rémunérations deviennent moins intéressantes avec la baisse des taux d’intérêt. On observe notamment un très fort engouement pour les stratégies de portage obligataire. Les fonds à échéance, qui permettent de capitaliser sur les niveaux de rendement actuellement élevés, ont ainsi collecté 15 milliards d’euros depuis le début de l’année (tous niveaux de notations confondus), qui viennent s’ajouter aux 25 milliards déjà collectés en 2023.

De quelle manière orientez-vous vos stratégies d’investissement ?

Il faut garder à l’esprit que le high yield est un univers de niche – environ 300 émetteurs pour une masse de dette totale en devise euros de 400 milliards – et qu’un travail d’analyse crédit poussé s’impose pour y investir. Les entreprises ayant ce type de notations sont en effet plus vulnérables aux cycles économiques, en raison de leur taille restreinte et/ou de leur niveau élevé d’endettement.

En ce qui concerne nos fonds datés, nous structurons les portefeuilles de nos millésimes successifs de manière différente pour tenir compte de l’évolution des conditions de marché. Ainsi, le fonds EdR SICAV Millesima Select 2028 est exposé à hauteur de 70 % à des obligations investment grade et de 30 % à des obligations à haut rendement. Le fonds EdR SICAV Millesima 2030 est quant à lui investi à hauteur de 80 % sur le segment du high yield (avec un biais qualitatif, le poids des notes BB atteignant 50 %).

On observe de très grandes disparités entre les secteurs en termes de performances, dont nous tenons compte dans l’ensemble de nos stratégies obligataires, qu’elles soient datées, benchmarkées ou encore sur des durations courtes.

Nous avons renforcé notre exposition au secteur immobilier, qui avait fortement souffert de la hausse des taux d’intérêt en 2022. Les anticipations de baisse des taux, qui ont été suivies d’effet, lui ont redonné du souffle et lui ont permis de retrouver ses attributs de secteur défensif. Le potentiel de performance du secteur, qui reste décoté, n’est de notre point de vue pas épuisé et certains émetteurs pourraient voir leurs notations relevées.

Nous sommes par ailleurs exposés aux télécoms et à la pharmacie, deux industries traditionnelles du segment high yield avec des pondérations élevées. Toutes deux sont par nature moins exposées aux aléas du cycle. Nous suivons attentivement tous les secteurs associés à la construction neuve (matériaux, chimie) en vue d’opérer une rotation graduelle. Ils sont actuellement en bas de cycle mais pourraient dans les prochains trimestres bénéficier de la reprise d’activité dans le secteur immobilier.

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