Bram Bos, pionnier et gérant principal de la stratégie obligations vertes, sociales et d’impact chez NN Investment Partners, revient sur les enjeux actuels des obligations à impact positif.
Comment évolue le marché des obligations vertes ?

Dans le sillage des années précédentes, le marché mondial des obligations vertes a connu une croissance extrêmement soutenue en 2021, avec 440 milliards d’euros émis par les émetteurs, toutes catégories confondues (souverains, agences supranationales, entreprises, etc.), contre 200 milliards d’euros un an plus tôt. Nous prévoyons un exercice 2022 record, avec 600 milliards d’euros de volumes d’émissions. Malgré une baisse au premier trimestre, les engagements pris par les Etats et les entreprises en faveur de la décarbonation de l’économie militent pour un recours toujours plus important aux obligations vertes à moyen-long terme.
Ceci est positif pour les investisseurs, car, selon nous, les émetteurs de telles obligations sont davantage tournés vers l’avenir, innovants et moins exposés aux risques climatiques et ESG.
Ces dernières années, la palette d’obligations à dimension ESG n’a cessé de s’étoffer, avec notamment l’émergence depuis 2019 des sustainability-linked bonds (SLB). Dans ce cadre, quels avantages comparatifs conservent les green bonds pour les émetteurs ?
En ce qui concerne l’extension de la palette de produits obligataires ESG, je tiens d’abord à préciser que certains d’entre eux, à l’image par exemple des obligations bleues (blue bonds), ne constituent en réalité qu’une sous-catégorie des obligations vertes (green bonds). Or, la multiplication des labels tend malheureusement à instiller de la confusion pour les émetteurs comme les investisseurs, tant les différences entre les types d’obligations sont parfois ténues, voire inexistantes.
S’agissant plus spécifiquement des bénéfices intrinsèques aux green bonds, ils sont au moins doubles. Alors que ce marché est très mature, il est, d’une part, véritablement le plus standardisé, ce qui renforce son attrait pour les investisseurs. D’autre part, les caractéristiques du produit le rendent très transparent. En effet, les fonds levés sous la forme d’une obligation verte doivent impérativement être alloués à un investissement précis (use-of-proceeds), dont les bienfaits sur le plan environnemental sont immédiatement mesurés. Ces émetteurs listent les projets qu’ils vont mettre en œuvre pour atteindre leurs objectifs environnementaux, par exemple, net zéro.
Dans le cas d’un SLB, l’émetteur peut utiliser les fonds à sa guise. Il s’engage à améliorer certains indicateurs ESG, mais cet engagement porte sur un horizon lointain sans feuille de route précise.
Les critiques au sujet du greenwashing restent toutefois persistantes. Comment luttez-vous contre ce risque chez NN IP ?
Déjà, nous nous appuyons sur une équipe très fournie, avec notamment quatre spécialistes chargés exclusivement d’analyser les projets que les émetteurs souhaitent financer. En outre, nous avons déployé un processus d’investissement extrêmement rigoureux, qui consiste à passer au crible l’intégralité des titres estampillés verts, avant de ne présélectionner que ceux éligibles à nos divers critères. Enfin, notre analyse tient compte de la stratégie ESG globale de l’émetteur, bien au-delà du seul projet financé.
Pour quels résultats ?
Nous avons lancé notre stratégie consacrée aux obligations vertes en 2016, et comptons aujourd’hui quatre fonds dont l’encours global excède 6 milliards d’euros. Tous détiennent l’exigeant label GreenFin. Des études d’impact ont quantifié que les investissements réalisés depuis six ans avaient permis d’éviter le rejet de plus de 300 000 tonnes de CO2 ! La satisfaction est d’autant plus grande qu’à cet impact positif très conséquent s’ajoutent de solides performances financières, nos différents véhicules ayant régulièrement surperformé leur indice de référence. Ce constat nous incite à aller toujours plus loin dans l’enrichissement de notre gamme de solutions à impact.
Est-ce dans ce cadre que s’inscrit le lancement, fin juin, de votre stratégie d’obligations sociales ?
Tout à fait. Même s’il s’agit d’un marché encore jeune, sur lequel des clarifications doivent être apportées afin de mieux définir les projets éligibles, celui des social bonds s’est considérablement développé depuis le début de la crise sanitaire. Avec une taille dépassant désormais 400 milliards d’euros et appelée à croître fortement au cours des prochaines années – nous prévoyons 250 milliards d’euros d’émissions sur l’ensemble de 2022 –, il recèle de nombreuses opportunités d’investissement. Surtout, cet instrument s’inscrit pleinement dans notre stratégie d’investissement à impact puisque les projets qu’il vise à financer ont vocation à contribuer positivement à dix des objectifs de développement durable (ODD) définis par les Nations unies, qui vont de la lutte contre la pauvreté́, la famine ou encore les inégalités liées au genre, à l’action en faveur d’une éducation de qualité́ et d’un travail décent.