Si la hausse des droits de douane américains à l’égard de l’Europe était attendue, celle frappant l’Asie est beaucoup plus lourde que prévu. En conséquence, les pays asiatiques, la Chine au premier chef, vont envahir l’Europe avec des produits à prix cassés, au détriment des industriels européens. La reprise économique européenne s’en trouvera retardée, la désinflation étant au contraire accélérée, incitant la BCE à aller plus loin dans la baisse des taux.
20 % de droits douane sur les produits européens ! Pour les entreprises européennes exportant aux Etats-Unis, le défi va être immense, surtout en BtoC, au cours des mois à venir. Cependant, ce taux était plus ou moins attendu. Pas de surprise, à cet égard. En revanche, ce qu’a annoncé Donald Trump concernant les pays asiatiques était beaucoup moins anticipé. Avec 54 % de droits de douane – au total – sur les produits chinois, le président américain a eu la main lourde. A tel point que les autorités chinoises semblent ne pas croire à tel scénario, semblant sidérées, et appelant à des discussions avec Washington. Mais si Donald Trump reste sur sa position annoncée, la Chine et les autres pays asiatiques, logés peu ou prou à la même enseigne, vont se trouver en difficulté. Le plus probable, c’est qu’ils cherchent alors à vendre leurs produits en Europe, avec des droits de douane infiniment plus faibles. C’est ce que soulignent notamment les économistes de la Deutsche Bank. « La Chine en particulier va faire face à un mur tarifaire aux Etats-Unis, et il est inévitable en conséquence qu’elle cherche à réorienter ses exportations vers l’Europe, seule façon de traiter le problème de ses surcapacités industrielles. » En conséquence, les industriels européens qui, moins taxés que les industriels chinois aux Etats-Unis, pourraient y prendre des parts de marché, seront confrontés sur leur marché domestique à une concurrence chinoise par les prix redoutable. Ce sera le cas aussi sur les autres marchés, hors Europe et hors Etats-Unis.
Une accélération de la baisse des taux
D’un point de vue macroéconomique, cet afflux de produits asiatiques à prix encore plus bas qu’aujourd’hui sera à l’origine d’une désinflation accélérée et d’une conjoncture industrielle dégradée en Europe. Si l’ampleur de la réaction des autorités n’est pas connue, son orientation est claire : il s’agira de soutenir l’activité, la concurrence des produits chinois empêchant toute reprise industrielle et donc tout redémarrage de la croissance du PIB. Face à une conjoncture bien plus morose que prévu, et une tendance à la désinflation accélérée, « la BCE devrait accélérer la baisse des taux, par rapport à ce qui était prévu », affirment les économistes de la Deutsche Bank. Nombre de prévisionnistes estimaient jusqu’aux annonces de Donald Trump que la Banque centrale européenne ne descendrait pas sous les 2 % pour la facilité de dépôt, le taux de référence, déjà fixé à 2,25 %. Ce pourrait être finalement le cas.
Côté budgétaire, le gouvernement allemand tentera probablement de mettre en œuvre plus rapidement son plan de relance, les obstacles techniques sont nombreux, à cet égard. En conséquence, la croissance allemande serait à nouveau proche de zéro en 2025, selon la Deutsche Bank. Elle n’accélérerait qu’en 2026. Les autres pays européens seraient bien sûr affectés, le PIB français, dont la Banque de France estimait avant les annonces américaines qu’il progresserait de 0,7 % cette année, voyant sa progression se rapprocher de zéro.